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dimanche 15 septembre 2013

Le parquet demande la relaxe de l’ex-directeur

Stéphane Scotto, ex-directeur de la maison d’arrêt Charles-III, nie toute responsabilité dans le processus qui a conduit au meurtre de Johnny Agasucci, tué par son codétenu en 2004. Délibéré au 30 septembre.
 
Stéphane Scotto avec son avocat M e Patrick Maisonneuve.  Photo Pascal BROCARD
Stéphane Scotto avec son avocat M e Patrick Maisonneuve. Photo Pascal BROCARD
Pourquoi Johnny Agasucci, mort dans la nuit du 24 au 25 août 2004, a-t-il été placé dans la même cellule que Sébastien Simonnet ? Pourquoi la direction de l’époque n’a-t-elle pas pris de mesures pour surveiller ce codétenu violent, mis en examen pour tortures et actes de barbarie sur Cyril Beaune, dans la même prison, quatre ans plus tôt ?
A la barre, l’ex-directeur de Charles-III reste droit dans ses bottes, malgré ces poursuites inédites en prison – homicide involontaire par manquement à une obligation de sécurité – qui pèsent sur lui.

« Psychopathe »

Costume gris, chemise blanche, l’actuel patron de Fresnes louvoie, jargonne et expose doctement sur l’art de bien emprisonner. « Depuis neuf ans, je me suis posé la question de ce que j’aurais pu faire de plus. Je n’ai pas trouvé la réponse. Loin des y a qu’à , faut qu’on. »
A l’opposé, Me Alain Behr, avocat de la mère de Johnny, 26 ans, primo délinquant, est convaincu du contraire : « M. Scotto ne pouvait pas ne pas avoir conscience de la dangerosité de Simonnet. Il avait commis des actes sadiques sur l’un de ses codétenus. Quand on accueille un psychopathe, on prend les mesures qu’il faut. Or, on s’est débarrassé du problème Simonnet ».
La vérité se situe probablement dans cette zone grise qui s’épanouit entre ces deux positions catégoriques.
La présidente Catherine Hologne a, la première, cadré les débats : « Il y a, au moins, eu une faillite de l’institution car il y a eu un mort en prison. » Cette mise en cause de la pénitentiaire a pourtant été l’axe de défense principal d’un prévenu redoutable de précision chirurgicale. « La détention, c’est le troisième protagoniste du dossier. J’étais au courant des actes de tortures et de barbarie perpétrés par Simonnet mais il n’y avait pas de cellule individuelle à Charles-III, qui était surpeuplée et vétuste. Je l’ai reçu, et il venait d’obtenir sa semi-liberté. Pendant deux ans, rien ne permettait de renforcer ses conditions de détention. »

« Grenade dégoupillée »

La pénitentiaire, elle, n’a pas traîné, au début de l’affaire, à reconnaître sa faute en versant un total de 150 000 € de dommages et intérêts à la famille de Johnny comme l’a rappelé Me Xavier Iochum, défenseur des parties civiles.
Alors que Stéphane Scotto s’est présenté en fonctionnaire novateur (rondes de nuit, croquis signalétiques, fiches de liaison) au parcours exemplaire, les débats laissent un goût d’inachevé dans les rangs des victimes. « Simonnet, c’était une grenade dégoupillée dans la cellule 118. Il fallait une surveillance particulière, qui n’a pas eu lieu. Vous portez la responsabilité de ce dysfonctionnement », a estimé Xavier Iochum.
Yvon Calvet, procureur adjoint, a tranché en faveur du prévenu, en requérant sa relaxe, en fin de journée, dans la continuité du non-lieu déjà rendu par son parquet initialement dans le dossier.

« Grande injustice »

« Je ne vois pas de lien de cause à effet entre la mort de Johnny et M. Scotto. Ce serait une grande injustice de le condamner », a-t-il estimé, se déclarant dans l’incapacité de « caractériser la faute » de Stéphane Scotto, qui encourt jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.
Me Patrick Maisonneuve s’est appuyé sur ce réquisitoire, qui a provoqué le départ de la salle d’audience de la mère de Johnny. « On tente de refaire l’histoire. Personne n’a pu dire ce qu’il aurait pu faire, ce qui constitue une faute ! » Dél ibéré au 30 septembre.

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