On compte, en France, 117 détenus pour 100 000 habitants et ce chiffre ne cesse de croître – il était de 92,8 pour 100 000 il y a dix ans.
Endémique, la surpopulation carcérale touchait en 2012 22 pays sur les 47 que compte l'organisation paneuropéenne, selon le Conseil de l'Europe
La durée moyenne d'un séjour en prison augmente également : 8,7 mois environ, pour 2,1 en Suède. La France (76 400 prisonniers à la fin 2012) se place, à cet égard, dans la partie supérieure d'un classement établi par le Conseil de l'Europe, loin toutefois derrière l'Ukraine, où un détenu reste, en moyenne, 39 mois derrière les barreaux…
« En France comme dans d'autres pays, les pouvoirs passent et les prisonniers restent », commente Marcelo Aebi, de l'Université de Lausanne, qui a coordonné une vaste enquête sur la détention pour l'institution strasbourgeoise, censée veiller au respect des droits humains dans quarante-sept Etats. Sous-entendu : les politiques peinent à aborder le débat de fond sur la situation réelle et l'utilité de la détention, ce qui exige, dit-il, « du sang-froid et une absence de démagogie ».
« Même si le taux d'homicide reste, en Europe, le plus bas au monde, on note une montée de l'agressivité, un changement des styles de vie et une augmentation de comportements liés à la consommation d'alcool ou de certaines drogues, chez les jeunes notamment, note M. Aebi. Cela induit, chez les politiques, l'idée qu'il faut durcir la politique criminelle, ou que la population veut plus de répression, ce dont je ne suis pas certain », poursuit le professeur.Son étude, publiée mardi 29 avril, et basée sur des données de 2012 pour 43 pays – la Russie, notamment, n'a rien fourni – comporte des chiffres étonnants. Sur les 1 737 061 détenus recensés, 25 % n'avaient pas fait l'objet d'une condamnation définitive. Les établissements sont surpeuplés dans 21 des 47 Etats observés et, même si on note une très légère baisse, on recense en moyenne 98 détenus pour 100 places – mais 132 en Belgique, 145 en Italie et 160 en Serbie.
L'état des établissements, leur vétusté ou leur situation sanitaire ne font, il faut le noter, pas l'objet de ce rapport. C'est le Comité de prévention de la torture du Conseil de l'Europe qui s'en soucie et publie, à intervalles réguliers, des appels à la lutte contre la surpopulation afin de garantir une meilleure réinsertion des auteurs d'actes criminels. Estimant que la prison doit être une sanction en dernier recours, les responsables du Conseil en appellent à l'extension rapide des peines alternatives : la probation, les services à la collective, l'usage du bracelet électronique, l'assignation à domicile sous surveillance, etc.
Un Etat comme les Pays-Bas, qui multiplie le recours à ce type d'outils, voit sa population carcérale diminuer de 3 % par an et peut louer une partie de ses établissements à la Belgique voisine, en attendant qu'elle achève un programme de construction de nouveaux centres. En revanche, le taux de détention a, en l'espace de dix ans, crû de 26 % en France, 32 % en Belgique et 117 % à Chypre.
COURTES PEINES
Les mesures alternatives seraient d'autant plus utiles, estime l'étude, que les tribunaux prononcent de plus en plus souvent des condamnations à de courtes peines (moins d'un an), qui concernent désormais 20 % des détenus alors que les condamnés à plus de dix ans représentent moins de 12 % des personnes incarcérées. Si le vol reste le motif de détention le plus fréquent (17 %), les infractions à la législation sur les drogues sont la deuxième cause d'emprisonnement en Europe (16,7 %). Le rapport met encore en évidence une augmentation des taux de suicide derrière les barreaux et du nombre d'étrangers incarcérés. Ces derniers sont désormais 17,2 % en France, 45 % en Espagne et 74 % en Suisse. Parmi eux, on relève globalement, en Europe, 34 % de citoyens de l'UE, 5 % de demandeurs d'asile et 40 % de prévenus.
Une dernière donnée illustre à la fois le coût de la détention et les écarts entre les pays examinés : si le montant dépensé par détenu est de 103 euros par jour en moyenne, il est de 3 euros en Bulgarie, 280 en Norvège et 620 en Suède. Ces dépenses étant inversement proportionnelles au taux de détention : les pays qui consacrent le plus d'argent aux prisonniers sont ceux qui en comptent le moins.
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