Ultime solution pour les adolescents avant la prison, le centre éducatif fermé d’Angoulême a été fermé pour un mois sur décision du préfet. Un rapport pointe de nombreux dysfonctionnements.
Selon des éducateurs, le bâtiment n’est pas configuré pour accueillir correctement des adolescents en difficulté. «La surveillance est impossible», estime l’un d’eux.
«Non-respect des conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement.» «Nombreux incidents s’étant déroulés au sein du centre éducatif fermé depuis son ouverture.» «Absence de projet fédérateur d’équipe.» «Absence de modules et de phasage dans la prise en charge éducative.»
«Dysfonctionnements.» «Manque de cohérence et de cohésion au sein de l’équipe éducative.» L’arrêté signé par le préfet de la Charente le 3 novembre est sans appel et a été appliqué par la chancellerie. Le 6 novembre, le centre éducatif fermé (CEF) d’Angoulême a été fermé pour un mois. Au moins.
«Fermeture provisoire», dit l’arrêté de la garde des Sceaux, daté du 7 novembre. Et réouverture pour l’instant envisagée le 6 décembre.
«Le centre a été fermé en raison de multiples incidents qui s’y sont déroulés ces derniers mois, reconnaît Patrice Camberou, le procureur de la République, qui relativise. Il n’y a rien eu d’extrêmement grave, mais une multiplication d’incidents qui ont amené à cette décision.»
Un quotidien très lourd
Cet été, un éducateur avait été sérieusement amoché par trois jeunes. Plusieurs fugues ont été signalées. Au mois de septembre, une éducatrice avait été giflée. Au commissariat, William Besse, le patron des policiers charentais, confirme: «Nous y étions appelés très souvent pour des comportements hyperexcessifs des résidents.»
En dix-huit mois, ce centre, qui complète l’arsenal répressif de la justice des mineurs, dernière étape avant une éventuelle incarcération, n’a jamais réussi à trouver la bonne carburation.
Dès le mois de novembre 2013, six mois après l’ouverture de locaux qui ont coûté la bagatelle de 2 millions d’euros, la structure faisait l’objet d’une mission d’inspection. Le rapport, très critique, a notamment débouché sur un changement de directeur. «Le premier n’avait pas du tout le bon profil», confirme un professionnel de justice, suivi dans ses propos par de nombreux proches du dossier. À l’inverse, Olivier Hars, directeur depuis le printemps, fait l’unanimité.
Mais Isabelle Grenolleau, secrétaire régionale du syndicat SNPES-FSU, tempère: «Il y avait des problèmes. Mais la place d’une seule personne ne peut expliquer l’ensemble des dysfonctionnements qui ont perturbé le quotidien de ce centre.»
Et ce quotidien était lourd, pesant, si l’on en croit un éducateur. «Le personnel a été jeté en pâture dans la structure», dénonce-t-il. Il décrit les agressions, les fugues, les burn-out, les arrêts de travail.
Juste avant la fermeture, les murmures d’un prochain mouvement de grève parvenaient au-delà des murs du centre.
Pour pallier les arrêts d’un personnel en souffrance, la direction de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a été contrainte de faire appel à un fort contingent de contractuels, «ce qui n’a pas permis de stabiliser ni de souder l’équipe», estime Isabelle Grenolleau. L’été dernier, pour faire face, il a même fallu appeler un veilleur de nuit intérimaire.
«À partir de cinq ou six ados, ça pète!»
Pire. Le bâtiment est censé pouvoir accueillir jusqu’à 12 adolescents. Mais tous les professionnels interrogés l’assurent: «Dès qu’il y en a cinq ou six, ça pète! C’est impossible d’en avoir plus.» Ces dernières semaines, ils n’étaient d’ailleurs que trois, venus de Niort, Poitiers et La Rochelle.
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