On les a souvent comparés à des barreaux accrochés aux chevilles, on pourra maintenant parler d’éthylotest permanent. Aux Pays-Bas, des bracelets électroniques seront bientôt équipés d’un détecteur d’alcool.
À Londres où ils sont déjà utilisés depuis plusieurs années, ils sont surnommés les « bracelets sobriété ». Placé à la cheville, le dispositif mesure le taux d’alcoolémie de celui qui le porte, grâce à sa sueur.
Addictions chez 60% des condamnés
Le projet en est encore au stade expérimental. Actuellement testés par des professionnels du milieu pénitentiaire, les bracelets devraient être mis en service pour les fêtes de fin d’année.
C’est en tous cas l’objectif que s’est fixé Edwin Ten Holte, le directeur de l’agence de probation SVG, spécialisée dans les infractions liées aux addictions. Aux Pays-Bas, cette structure s’occupe de 30% des personnes condamnées à une peine de probation – des peines alternatives à l’incarcération telles que les travaux d’intérêt général. D’après Edwin Ten Holte, c’est pourtant près de 60% des personnes condamnées qui souffriraient de problèmes d’addiction aux drogues ou à l’alcool.
A l’heure où la majorité des pays d’Europe souffre de surpopulation chronique, les Pays-Bas vident leurs prisons (Margot Hemmerich/Léa Ducré)
Les bracelets électroniques capables de détecter la consommation d’alcool ouvrent donc de nouvelles perspectives judiciaires aux Néerlandais. Mais avant de pouvoir le mettre en vigueur, le dispositif doit être intégré dans la législation du pays. L’agence SVG travaille actuellement avec le ministère public afin de régler les aspects juridiques, et d’adapter le code pénal aux évolutions technologiques.
Contrôle permanent
Car au fond, c’est surtout à des questions éthiques que se heurtent les députés. Le choix de porter un bracelet sobriété doit-il être laissé aux personnes ayant commis des délits liés à l’alcool ? Ou le juge devrait-il au contraire pouvoir l’imposer, comme en Angleterre ?
La question fait d’autant plus débat que celle de l’efficacité de ce bracelet sur la maladie alcoolique se pose. Pour le directeur de SVG, l’objectif est assumé et la pertinence du dispositif assurée. Ces bracelets permettent de contrôler à tout moment si ceux qui les portent ne sont pas en train de boire.
« Avec ce système, ils ne pourront plus prétendre qu’ils sont restés sobres. Tous les jours, et à chaque moment de la journée, nous pourrons vérifier si la personne est en train de consommer, ou non. »
Toutes les 30 minutes, le boîtier fixé à la cheville teste le taux d’alcoolémie. En cas de détection positive, un signal est automatiquement envoyé à l’agent de probation, ou à la police.
Pourtant, un tel contrôle ne doit pas occulter les multiples problèmes d’exclusion liés à la dépendance à l’alcool. Les travailleurs sociaux insistent. De leur point de vue, le bracelet ne peut pas remplacer la relation qu’ils entretiennent avec leurs clients et les rendez-vous en personne. Les causes socio-économiques sont trop nombreuses. Les agents de probation soutiennent donc ce dispositif en tant que complément aux peines de probation et aux traitements de substitution à l’alcool.
« Nous essayons de faire en sorte que la loi l’autorise comme condition supplémentaire aux peines alternatives, explique Edwin Ten Holte. Le but est d’accroître la motivation et la pression sociale pour changer le comportement des personnes. »
D’abord des volontaires
Les premières cibles pourraient donc être des personnes volontaires, en cure de désintoxication, placées sous probation. « Cela nous permettrait de voir comment le bracelet les aide, et si elles supportent le dispositif. Après seulement on pourra envisager un usage coercitif encadré par la loi », appuie Jonathan Douma de l’agence SVG.
Le « volontariat » sera sans doute fortement encouragé : les personnes condamnées pour des délits liés à l’alcool auront le choix entre la prison et le bracelet sobriété. À terme, le dispositif pourra être couplé à une assignation à résidence, comme la loi le prévoit au Royaume-Uni par exemple. Aux Pays-Bas, l’idée est encore loin de séduire tout le monde.
Allan avait l’habitude de boire une bouteille de vin par jour. Depuis deux ans, il a tout arrêté et estime que le bracelet ne l’aurait pas aidé.
« J’ai réduit ma consommation petit à petit. Cela prend du temps, mais il faut que ce soit un choix personnel. Sinon, sans cette volonté véritable, on rechute un an plus tard. »
Une idée que partage Barbara, agent de probation à SVG depuis cinq ans. « Quelqu’un qu’on oblige à porter le bracelet passera davantage de temps à essayer de trouver une faille dans le dispositif, qu’à chercher à se soigner », redoute-t-elle.
Avantage économique
Quoi qu’il en soit...
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