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lundi 28 décembre 2015

Au centre pour mineurs de Lavaur, l'archéologie aide à reconstruire l'avenir

L'établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) de Lavaur accueille un projet original de la Protection judiciaire de la jeunesse et de l'Education nationale, inspiré par la COP21 : parler de l'évolution du climat à travers les découvertes faites dans la grotte préhistorique du Mas d'Azil, en Ariège.


Par la fenêtre de la classe, se lisent trois tableaux bombés sur le mur de la cour. Noir, le premier peint un monde sinistré et interroge «C'est ça ta planète ?» «Ensemble on peut la sauver», propose le deuxième. Vert, le troisième ressuscite des papillons dans un paysage bucolique. «ça, c'est ma planète», conclut-il.


Reconstruire l'avenir ? Tout l'enjeu pour les jeunes mineurs détenus à Lavaur, dans le Tarn. Et l'étude du passé peut y aider. Trois ados entrent. Depuis deux mois, ils planchent ainsi sur la grotte du Mas d'Azil.


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Pipo ? Lui, c'est la tchatche. Un flow qui rêve de trouver son micro. Souriant et dégingandé, Omaly, s'assied, plus réservé. Mais pas aussi timide que Clément (1) qui rend à Pauline La géologie à petits pas qu'elle lui a prêté. Seul point commun ? Leur âge : 17 ans.


«C'est l'avant dernière séance : écologie, géologie, climat, archéologie, maintenant on va tout reprendre et rédiger», commence cette dernière. Archéologue elle sera là pour les aider avec Blaise, leur professeur. Et eux écriront donc ce chapitre sur «l'enregistrement climatique de la grotte du Mas d'Azil» pour le prochain livre de l'association Grottes et Archéologie. Du sérieux en l'occurrence.
Deux mois que Pauline leur fait donc remonter le temps jusqu'à cette période glaciaire d'il y a 17 000 ans, sur les traces des chasseurs du paléolithique et du mammouth laineux. Mais pas seulement. Car avec tout ce que la grotte du Mas d'Azil a enregistré durant des millénaires dans ses flancs, elle leur explique aussi les rapports de l'homme à son environnement, à travers les conséquences des changements climatiques d'autrefois sur sa «maison», cette vaste caverne ariégeoise.


Clément revoit avec elle les «spéléothèmes» : mot qui le fait transpirer et englobe «les stalactites, les stalagmites, le plancher stalagmitique». Omaly ? Lui traite d'une autre horloge millénaire : l'activité de la rivière qui traverse la grotte. L'occasion d'aborder les méthodes de datation.


«Trouver une pierre taillée à une certaine profondeur, ça permet de dater», se souvient-il. Mais il y a aussi le «carbone 14,» note Pipo qui lui, bosse sur les gros rochers. «Quand l'eau gèle dans les fissures, ça fait “exploser” la roche qui tombe», explique-t-il. Alternance des périodes froides et chaudes, «Le calcaire va s'éroder plus rapidement lorsqu'il fait chaud», l'aide à rédiger précisément Blaise.


Un mot pour chaque chose, une information par phrase... une occasion de plus de travailler le socle des connaissances. Et de tisser l'air de rien, des liens entre hier et aujourd'hui, sur la fragilité des espèces et leur disparition face aux grands bouleversements.


Omaly s'applique, belle écriture ronde. «On a aussi discuté de l'évolution de l'homme, de la bêtise du racisme, on est tous des homo-sapiens», retient-il. Clément surprend son monde avec la datation radiométrique et se passionne pour les animaux disparus. «Apprendre ce qu'il y avait avant, c'est super» s'enthousiasme Pipo.


Mais un travail de funambule pour les profs, reconnaît Blaise. Seuls «10 à 15 % des jeunes ne sont pas en échec scolaire à leur arrivée», constate Nathalie, responsable de l'unité éducative de l'EPM. «Il faut refaire du lien de confiance, ils ont souvent une image très écornée de l'école», rappelle Blaise. De l'archéologie à l'art de captiver par une discipline nouvelle... Sur l'étagère, Rabelais dit : «Je t'engage à employer ta jeunesse à bien progresser en savoir et en vertu et quant à la connaissance de la nature, je veux que tu t'y donnes avec soin». L'humanisme, l'éternelle clé.


(1)Surnom ou prénom qu'ils se sont choisis.

Favoriser la vie et les activités collectives

Premier établissement pénitentiaire pour mineurs ouvert en France en 2007, l'EPM de Lavaur a une capacité d'accueil de 45 garçons et 4 filles et prévoit dans ce cas aussi une cellule mère-enfant...

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