Piloté par le fondateur de l'Observatoire international des prisons, ce projet entend faire un état des lieux du système carcéral sur les cinq continents.
Une campagne de crowdfunding a été lancée sur internet afin de construire le site.
Le projet se veut ambitieux. Au lendemain de la publication d'un rapport du Conseil de l'Europe qui fustige le système carcéral français, un site dédié à informer le public sur l'état des prisons à travers le monde va voir le jour.
Piloté par Bernard Bolze, un ancien journaliste qui a fondé en 1990 l'Observatoire international des prisons (OIP), et qui a milité contre la double peine à travers sa campagne «Une peine, point barre», Prison Insider doit voir le jour au printemps prochain.
En attendant, une campagne de crowdfunding a été lancée afin de récolter 20.000 euros pour financer la construction de cette plateforme. Pour l'heure, plus de 16.000 euros ont été récoltés en quelques jours.
Liens commerciaux :
L'objectif du site est de centraliser toutes les informations sur les prisons du monde et les rendre accessibles à tous. Il convient ainsi d'informer les personnes qui ont un proche détenu dans un pays tiers sur les conditions de détention et sur les moyens de lui venir en aide. Actuellement, 2200 Français sont détenus à l'étranger sans parfois que ses proches sachent comment procéder, comme en a témoigné sur France Info vendredi dernier la femme du criminologue Christophe Naudin, arrêté en Égypte et extradé en République Dominicaine. «Ce qui m'inquiète le plus, ce sont ses conditions de détention, sa santé et son moral, il a un traitement médical assez sérieux», avait-elle affirmé.
Un site qui se veut «partisan»
Afin d'éviter les subventions étatiques et les prêts bancaires, mais aussi «pour se faire de la pub», argue-t-il avec un sourire, Bernard Bolze a opté pour une campagne de dons en ligne.
«Le crowdfunding est une manière de défendre notre indépendance et notre liberté d'expression», précise le fondateur de Prison Insider, qui entend créer un site «partisan». «Nous ne voulons pas développer une machine idéologique. Nous dénoncerons les aspects contraires aux normes internationales, mais nous valoriserons les bons côtés. Mais il est vrai que je suis un militant, je défends depuis longtemps l'utopie d'un monde avec moins de prisons», poursuit-il.
Grâce à ce site, il sera possible de comparer le système carcéral dans différents pays du monde afin de réformer au mieux la situation dans son pays. «Il existe une panoplie de sanctions, même en France, qui permettent d'éviter la privation de liberté. Pourtant, elles sont rarement appliquées». Une anomalie selon le fondateur de l'OIP puisque «plus on aménage la peine, moins on constate de récidives».
D'autant que tous les détenus ne sont pas des tueurs sanguinaires, souligne Bernard Bolze. «Certains sont en prison pour des délits tout à fait mineurs, et ils se retrouvent dans un environnement impitoyable».
«Je défends depuis longtemps l'utopie d'un monde avec moins de prisons»
Bernard Bolze, fondateur du site Prison Insider
Une ligne de conduite qui n'a pas dévié depuis qu'il a fondé l'OIP dans le but de promouvoir partout dans le monde le respect des droits des personnes incarcérées. Seulement, le Lyonnais ne se sentait plus à sa place dans cette organisation qu'il quitte en 1998.
L'OIP n'y survivra pas et le secrétariat international disparaîtra quelque temps après son départ.
Depuis, l'OIP n'a d'international que le nom et subsiste grâce à quelques sections nationales, notamment en France. «Il y a deux ans, j'ai retrouvé l'envie de relancer mon combat au sein de l'OIP en y ajoutant les bienfaits d'internet. Aujourd'hui, il est possible de dénoncer les anomalies du système carcéral d'un pays très rapidement», explique Bernard Bolze.
Concrètement, l'entreprise qu'il fonde comprendra un réseau de correspondants bénévoles sur les cinq continents. Des avocats, des militants des droits de l'Homme, des journalistes, qui veulent analyser les conditions carcérales dans leurs pays. Pour l'heure, Prison Insider comprend trois salariés à temps plein, et une vingtaine de correspondants dans vingt-cinq pays. Traduits en trois langues (espagnol, français et anglais), les articles du site devront être clairs et imagés afin d'être accessible à tous.
Un système d'abonnement
Ainsi, beaucoup de photos et de vidéos seront présentes pour montrer l'état des prisons, mais des enquêtes seront aussi disponibles. «La difficulté est de mobiliser beaucoup de personnes et de compétences en très peu de temps, et avec peu d'argent», confie Bernard Bolze. Afin de se rémunérer, le fondateur du site prévoit un système d'abonnement à 30 euros par an est prévu.
Les abonnés pourront ainsi avoir accès aux fiches de tous les pays et aux investigations sur le site, ainsi qu'à tous les contenus interactifs. Mais certains contenus seront également en accès libre comme la fiche détaillée de son pays d'origine, des photos des prisons dans son pays, ainsi que l'accès au forum. Un des objectifs du site est aussi de faire témoigner les détenus dans les prisons à travers le monde. «De nombreux détenus ont accès illégalement à internet, il suffira qu'ils se filment pour témoigner de leurs conditions de vie», explique Bernard Bolze.
Le projet a reçu le soutien de la Fondation de France, qui lui a donné un chèque de 50.000 euros, mais également du barreau de Lyon et de Louis Gallois, le président de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale, et président du conseil de surveillance de PSA.
Toutefois, Bernard Bolze souhaite à tout prix garder son indépendance pour pouvoir dénoncer librement l'état des prisons dans de nombreux pays, dont la France. «Notre rôle est de critiquer les manquements dans de nombreux pays afin de faire un état des lieux le moins subjectif possible. Pour cela, aucun conflit d'intérêts avec les États ne doit avoir lieu».
Le Figaro
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire