Force Ouvrière tire la sonnette d’alarme sur les extractions de détenus. Selon le syndicat, les personnels de Liancourt, en sous-effectif, sont soumis à des cadences infernales.
Emmener un prévenu au palais de justice ou sur une scène de reconstitution. Depuis 2012, ces missions d’extractions judiciaires, auparavant dévolues aux policiers ou aux gendarmes, reviennent à l’administration pénitentiaire.
À la prison de Liancourt, le syndicat Force Ouvrière tire la sonnette d’alarme, dénonçant « des cadences infernales » faute d’effectif suffisant surtout depuis novembre dernier, suite au déploiement des pôles de rattachement d’extraction judiciaire (PREJ) sur le Nord – Pas-de-Calais.
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« La moitié des agents de Liancourt ont été mutés dans le Nord mais ils n’ont pas été remplacés. Aujourd’hui, on devrait être 28 agents, contre 15 actuellement. On double, voire triple nos missions quotidiennement », s’inquiète Jérémy Jeanniot, secrétaire local Force Ouvrière du centre pénitentiaire de Liancourt.
Conséquence, les escortes judiciaires seraient, selon lui, « de moins en moins sécurisées ». « Au lieu de trois personnes, ils ne sont plus que deux à assurer le transfert des prisonniers, et cela quels que soient le profil et la dangerosité du détenu ».
« Le burn-out des agents est imminent »
Le syndicat a appris la semaine dernière, dans une note sur la mobilité des surveillants, que lors de la prochaine commission administrative paritaire au mois de juin, aucun poste ne sera proposé sur le PREJ de Liancourt, ni aucune place aux futurs stagiaires sortant d’école à la fin du mois.
« Il faut que les choses bougent, le burn-out des agents est imminent. Le ministère de la Justice a annoncé la création de 5 000 personnels judiciaires en plus après les attentats. On espère ne pas être les grands oubliés de la République… », poursuit Jérémy Jeanniot.
Interrogé, Alain Jego, directeur interregional des services pénitentiaires de Lille, indique que cette situation tendue devrait se régler dans les prochains mois : « On a effectivement eu une baisse sensible des effectifs depuis décembre, suite à l’ouverture des PREJ du Nord – Pas-de-Calais. Dans les prochains mois, la situation devrait rentrer dans l’ordre, avec le comblement des vacances de postes ».
Les aléas et les lourdeurs des escortes
Tribunal de Compiègne. Début 2016. Alors que l'audience s'apprête à débuter, on découvre avec surprise que le prévenu est escorté par des membres du Peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (Psig). En lieu est place d'agents de l'administration pénitentiaire. « Ils n'avaient plus d'escorte de disponible, commente un militaire. Nous, on était sur une intervention pour un cambriolage, avec une autre unité. L'autre est restée et nous... Nous voilà. » Un peu dépité.
Autre jour, même lieu. Et toujours pas d'escorte de l'administration pénitentiaire pour amener deux détenus à l'audience de comparution immédiate. Qu'à cela ne tienne : la visioconférence fera l'affaire. Ou presque. Sur l'écran, un simple fauteuil. Le détenu apparaît, s'assoit. Le son grésille. Le président teste le micro. Tout le monde s'entend à peu près. En criant un peu. « Monsieur, levez-vous », commence traditionnellement le magistrat. Mince, la tête du détenu dépasse de l'écran. «Bon, eh bien... Restez assis. » Pas facile de lire le visage du prévenu sur l'écran. Dommage pour un jugement. La procureure, qui s'apprête à recquerir, interroge : « C'est bon, vous me voyez ? » Deuxième essai, mais avec le micro. C'est bon.
« Franchement, c'est devenu très compliqué, soupire un membre de l'administration pénitentiaire, un jour où l'escorte a pu se libérer. « On est parti de Liancourt, où nous sommes basés, très tôt ce matin.
Direction Beauvais. Entrer dans le nouveau centre pénitentiaire, avec toute la sécurité, cela prend énormément de temps. Puis on est venu jusqu'à Compiègne, pour l'audience de 13h30. » Qui a commencé vers 15 heures. « Maintenant, il faut qu'on retourne à Beauvais, qu'on passe la sécurité, puis qu'on fasse le trajet jusqu'à Liancourt. » Soit une escorte complète retenue toute une journée pour le jugement d'un seul détenu.
Courrier Picard
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