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jeudi 23 juin 2016

BEAUVAIS - Le détenu fiché se lâche sur Facebook

L’affaire a été jugée mercredi 22 juin au tribunal de Beauvais. Poursuivi pour « apologie d’un acte terroriste » : « C’est une bêtise », assure le prévenu. « Non monsieur, c’est un délit », réplique le juge.


Le tribunal de grande instance de Beauvais. (Photo d’archives).

Fallait-il prendre au sérieux ce jeune détenu de 27 ans à Liancourt ? Oui, selon l’administration pénitentiaire qui l’a vu changer de comportement en 2015. Soupçon étayé un an plus tard sur Facebook.



La photo d’un mannequin, bardé d’un gilet cousu d’explosifs, y est signalée. La police judiciaire remonte jusqu’au détenu dans l’Oise. Fouille de cellule, au mois de mai dernier. Un téléphone portable est découvert.

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Dans la cellule de Liancourt, des articles de presse avec des photos d’hommes encagoulés de Daesh, sont affichés. Et deux graffitis : «  Il n’y a pas de Charlie ici  » et une signature : « Kalach ».

«  C’était mon nom quand je faisais du rap. C’est pas que j’ai une Kalachnikov  », précise Christophe Haton. Quant à Charlie Hebdo, il n’approuvait pas «  toutes les caricatures  ».

Il comprend les soupçons qui pèsent sur lui

Le prévenu ne nie pas l’évidence. Ne conteste aucun constat. Il claironne même raisonnablement, à sa façon  : «  Bien sûr, Daech, c’est de la barbarie  ,» lâche-t-il.

Il comprend les soupçons du juge. Et s’en défend comme d’une mauvaise farce : «  Je ne fais pas de prosélytisme, je n’ai pas d’intentions malveillantes. »

Alors pourquoi ces photos sur Facebook ? «  Une bêtise, une erreur, une provocation, un délire du moment.  » Il minimise : « Il y a 20 000 membres sur le réseau, on voit cent fois pire. Bien sûr, c’est pas bien ce que j’ai fait, mais j’ai pas voulu inciter des gens ! »

La parution sur Facebook, le 22 avril dernier, intervenait le lendemain d’un rejet de son projet professionnel par l’administration pénitentiaire. Le détail est relevé par le substitut du procureur.
Le tribunal l’interroge sur sa conversion, «  en quelques semaines  ». «  Il était récalcitrant, il est devenu calme et respectueux avec les surveillants. Il fréquentait des détenus radicalisés  », relève l’administration pénitentiaire. Mais pas l’imam ni le lieu de culte.  »

«  J’ai fait un travail sur moi-même. J’ai 28 ans, c’est fini les bagarres, les disputes  », explique-t-il.
À cette époque, mars 2015, il déclare à son conseiller d’insertion et de probation «  son souhait de faire de l’humanitaire au Proche-Orient  ». Trois semaines plus tard, il envoie balader ces conseillers, il n’a «  rien à attendre de la France  » et veut aller en Syrie, toujours pour des motifs humanitaires.
Il fera l’objet d’une fiche S (pour «  atteinte à la sûreté de l’État » ) le 12 octobre 2015.

Enfance déshéritée, sans formation, connu de la justice

Mais c’est peut-être moins l’État que l’administration et la terre entière que visent sa colère. «  J’ai pas de parents, de frères, de sœurs, de famille qui peuvent m’aider. J’ai que l’administration  », lâche-t-il.

Abandonné à la naissance, élevé en pouponnière jusqu’à 4 ans, recueilli par des parents adoptifs décédés, remis en foyer jusqu’à 11 ans… Il a un niveau scolaire de troisième. «  Je n’ai jamais travaillé », assure-t-il. Le legs d’une maison de 190 000 euros, à 19 ans, a pourvu à ses besoins. Mais ne l’a pas détourné d’un parcours de petite délinquance, dix condamnations dont il purge le passif actuellement.

Le tribunal de Beauvais l’a condamné à 10 mois ferme et maintenu en détention.

Courrier Picard

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