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vendredi 17 juin 2016

Directrice de prison : Mon métier, ma bataille

Eve Duchemin s’intéresse à une directrice d’établissement pénitentiaire qui cherche un équilibre pour poursuivre ce difficile travail.

Marie, 35 ans, est directrice de prison pour hommes. Un difficile métier qu’elle s’est choisi et qui lui coûte, à certains égards, sa vie de femme.

Il y a parfois des métiers qui suscitent des interrogations. Celui de directrice de prison est de ceux-là. Depuis quatre ans, Marie Lafont est à la tête du centre pénitentiaire pour hommes de Liancourt, en Picardie.



Caché dans les hauteurs d’un petit village, il regroupe deux centres de détention, une maison d’arrêt et un quartier pour mineurs. Soit 800 détenus et 400 personnes à gérer.

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Entre commissions de discipline, gestion du personnel et entretiens avec les détenus (toujours à visage découvert), la caméra d’Eve Duchemin suit sans relâche le quotidien de Marie dans un univers essentiellement masculin.

C’est pourquoi la directrice a dû se forger une carapace, pour se montrer « solide » dit-elle. « Coûte que coûte. » Comme ce jour où elle ­convoque un nouveau détenu. ­Celui-ci conteste sa peine, prenant en ­comparaison celle reçue par un ­pédophile. Marie finit par le recadrer sans agressivité, arguant ne pas être ici pour commenter une décision de justice mais pour favoriser la réinsertion des détenus.

La directrice assume pleinement sa fonction. Elle vit même au rythme de cette dernière. Le problème cependant n’est pas tant ce qu’elle pense, mais ce que les autres projettent sur son travail.

Regards intimistes

Ce portrait à la fois personnel et professionnel affiche un style particulier. Les plans sont très resserrés et il y a très peu de son. Le fond tient autant que la forme à l’esthétisme épuré dans ce film où le but est moins de comprendre ce qui se passe que de voir une situation donnée. L’absence de voix off souligne cette sensation. C’est Marie Lafont qui construit la narration.

En bataille trouve le juste équilibre entre regards intimistes, sans pour autant tomber dans le voyeurisme ou le sensationnalisme auxquels nous ont habitués certains reportages sur l’univers carcéral. La grande complicité entre la journaliste et la directrice de prison y est pour beaucoup.

 Timide au début, elle finit par retirer cette carapace que lui impose sa profession et s’entrouvre sur sa vie privée et ses envies d’ailleurs.

Ce rapport de confiance est la marque de fabrique de la réalisatrice. En février 2012, Eve Duchemin s’était déjà illustrée dans L’Age adulte où elle suivait Sabrina, une jeune fille de 20 ans au sortir de l’adolescence. Un film à la fois intime, politique et émouvant. Des sentiments qu’elle a su recréer.

Le Monde

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