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mardi 21 juin 2016

Policiers tués dans les Yvelines : qui sont les deux mis en examen ?

Deux proches de Larossi Abballa, le djihadiste qui a tué les deux policiers, ont été mis en examen et écroués. Ils sont, comme l'était Abballa, déjà connus des juges antiterroristes.

Policiers tués dans les Yvelines : qui sont les deux mis en examen ?

Interpellés dès le lendemain du double meurtre des policiers par Larossi Abballa, Saad Rajraji et Charaf-Din Aberouz ont été mis en examen, samedi soir, après 96 heures de garde à vue. Pour "association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes, en état de récidive légale."



Les juges antiterroristes n'ont pas retenu, à ce stade, une complicité directe dans la mort de Jean-Baptiste Salvaing et de Jessica Schneider, inhumés ce lundi dans l'Hérault.

Quel rôle les soupçonne-t-on précisément d'avoir joué ? Auraient-ils apporté une aide logistique au tueur de 25 ans qui s'est revendiqué de l'Etat islamique ? Laquelle ? Quelle était leur connaissance du projet de leur proche ? C'est ce que les enquêteurs cherchent notamment à savoir.

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Si le meurtrier des policiers était loin d'être inconnu des services, Saad Rajraji, 27 ans, et Charaf-Din Aberouz, 29 ans, ne le sont pas davantage.

Pourquoi sont-ils connus de la justice ?

En septembre 2013, Larossi Abballa, Saad Rajraji et Charaf-Din Aberouz s'étaient retrouvés tous les trois, ainsi que cinq autres, au tribunal correctionnel de Paris. Tous avaient de 19 à 32 ans, et étaient mis en cause dans un dossier de filière d'acheminement de djihadistes vers les zones tribales pakistano-afghanes du Waziristan, au nord-ouest du Pakistan.

A l'issue du procès, Saad Rajraji et Charaf-Din Aberouz avaient été condamnés à 5 ans de prison pour "association de malfaiteurs en vue de commettre des actes terroristes".

Larossi Abballa, lui, avait écopé d'une peine de 3 ans de prison dont 6 mois avec sursis. Ce dernier était accusé d'avoir recruté des candidats au djihad et de s'être entraîné avec eux. Saad Rajraji et Charaf-Din Aberouz, eux, avaient été présentés comme étant les lieutenants du chef du groupe, Mohamed Niaz Abdul Raseed.

Ce groupe s'était donné pour objectif de favoriser le recrutement de volontaires, leur formation physique et idéologique, ainsi que leur envoi au Pakistan en vue de faire le djihad armé. Ses membres se réunissaient le week-end dans des parcs du Val-d'Oise et de La Courneuve pour s'entraîner.

• Saad Rajraji

Né dans les Hauts-de-Seine, Saad Rajraji, 27 ans, vit en Seine-Saint-Denis. Lors de son interpellation dans ce précédent dossier, il travaillait en tant que technicien en électronique après avoir obtenu un DUT en électronique et informatique. L'enquête avait relevé que son rôle dans le groupe consistait notamment à organiser les entraînements sportifs et à recruter, sur Facebook notamment.

Lors d'une perquisition menée chez lui, le livre "Al Qaida, Manuel pratique du terrorisme" avait entres autres été saisi, ainsi qu'un document manuscrit intitulé "La rencontre" portant sur les règles de sécurité à respecter lors du recrutement d'un candidat au djihad. Il déclarait être musulman sans appartenir à une tendance ou un mouvement. Il avait aussi affirmé avoir rencontré Charaf-Din Aberouz en juillet 2010 sur Facebook, où il avait également pris contact avec Larossi Abballa.

Saad Rajraji a été libéré en novembre 2014. Dans un de ses téléphones saisi en détention par l'administration pénitentiaire figuraient plusieurs numéros permettant de joindre Thamer Bouchnak, imam autoproclamé considéré, selon "Le Point" qui révèle l'information, comme responsable du processus de radicalisation de nombreux détenus. Thamer Bouchnak a par ailleurs été membre de la filière des Buttes-Chaumont, a entraîné Cherif Kouachi et connaît bien Djamel Beghal.

Lors du procès, Saad Rajraji avait expliqué, rapporte "Libération" : "Ce qui m'a le plus attiré, c'est qu'en parlant de ce sujet [le djihad, NDLR] sur le Web, j'étais populaire, on me disait que j'étais courageux, j'avais une estime de moi encore jamais connue."

• Charaf-Din Aberouz

Charaf-Din Aberouz, 29 ans, est né dans les Yvelines. Titulaire d'un bac professionnel, il était sans profession quand, avec un autre jeune homme du groupe, il avait été arrêté le 25 janvier 2011 à Lahore, au Pakistan, que tous deux avaient rejoint via Bruxelles. Il avait ensuite été interpellé sur le sol français le 22 mai 2011, à Roissy, après son expulsion du Pakistan, puis mis en examen. Il avait été désigné "émir" du groupe par certains de ses membres. Et avait égorgé des lapins au cours d'une séance d’entraînement dans des parcs de la région parisienne.

Charaf-Din Aberouz est un ami d'enfance de Larossi Abballa, indique "Le Monde", qui précise qu'ils vivaient dans le même immeuble des Mureaux. Il a été libéré le 12 novembre 2015 au motif d'une réduction conditionnelle de peine, précise encore "Le Point". Selon la même source, il avait endossé en prison un rôle de "recruteur". Le 21 février 2012, selon une note de l'administration pénitentiaire que l'hebdomadaire a pu consulter, il avait rassemblé une quarantaine de détenus et prononcé un discours d'une dizaine de minutes "dans le plus strict silence des détenus présents qui semblaient conquis et admiratifs."

En juin 2013, la note fait état d'un comportement "violent dans ses rapports avec les 'mécréants'". Fin décembre 2014, il se réjouit à l'annonce de l'exécution d'Hervé Gourdel. Il changera cinq fois de prison en trois ans et demi.

Qu'ont dit les deux hommes du double meurtre des policiers ?

Après avoir été récemment interpellés, Saad Rajraji et Charaf-Din Aberouz ont condamné le double meurtre des policiers, selon BFMTV. La chaîne indique qu'Aberouz "refuse d'y être associé", qu'il reconnaît soutenir les thèses de Daech, mais ne cautionne pas le djihad armé ni les actions violentes. Face aux enquêteurs, Saad Rajraji a lui aussi, selon la chaîne, dénoncé les attentats du 13 novembre et les actions de Daech. Une liste de noms de policiers avec leurs adresses professionnelles aurait néanmoins été découverte à son domicile lors des perquisitions.

Un troisième homme âgé de 24 ans avait été interpellé mardi. Sa garde à vue a été levée sans poursuites. Samedi, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire. Notamment pour "assassinats sur personnes dépositaires de l'autorité publique [...] et complicité" et "séquestration [...] d'un mineur de moins de 15 ans", en lien avec une entreprise "terroriste". Elle vise à comprendre comment Larossi Abballa, gérant d'une petite société de vente de sandwichs, a pu préparer son attaque. Et avec qui.

L'Obs

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