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lundi 1 août 2016

Suicide en prison : aux Baumettes, des codétenus en soutien

En 2015, 20 détenus se sont donné la mort en prisonen région Paca. À Marseille, Salon et Tarascon, des codétenus vont jouer un rôle dans la prévention.

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Un suicide, ça n'est pas un échec en soi, mais on le vit comme tel", lâche le directeur interrégional de l'administration pénitentiaire, Philippe Peyron. "Nous n'avons pas d'obligation de résultat, mais de moyens."



C'est en ce sens que les parades mises en place pour tenter d'éviter au maximum ces drames se multiplient depuis une dizaine d'années. L'une des plus originales - "les codétenus de soutien" - a été lancée fin 2012, notamment à Toulon qui fut le site pilote pour la région Paca-Corse. En 2015, un audit a préconisé la généralisation de cette opération.

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Plusieurs détenus ont déjà entamé, il y a quelques semaines, leur mission à Salon, six sont désormais aptes à agir aux Baumettes à Marseille et quelques autres le seront prochainement au centre de détention de Tarascon. "D'abord, les détenus volontaires passent devant une commission pluridisciplinaire.

Il faut des solides, des gens cadrants, apaisants qui ne se serviront pas de ce statut pour se placer au-dessus des autres dans la détention", détaille Anne Gourrier, chef du département insertion, probation et politiques de prévention de la récidive, en charge de la problématique, loin d'être tabou en prison, mais l'une des plus sensibles tout de même. "Ensuite, ils sont formés par la Croix-Rouge aux gestes de premiers secours, puis à l'écoute de leurs codétenus et, enfin, à la détection des risques suicidaires par des professionnels."

"Il faut des solides, des gens cadrants, apaisants"

Au quotidien, tout détenu demandeur, ou repéré comme fragile, pourra s'entretenir avec un "CDS", voire passer quelques jours dans la même cellule. "L'écoute, la verbalisation des maux, c'est 90 % de la prévention du suicide et, évidemment, un lien particulier peut se créer puisque le détenu aidant peut avoir vécu la même souffrance", estime le directeur interrégional, Philippe Peyron.

Ces maux, environ 90 détenus sur 1 700 actuellement incarcérés aux Baumettes, en souffriraient, à des degrés divers. Ils sont, par conséquent, particulièrement surveillés.

"L'an dernier, tous les suicides que l'on a déplorés ont été consécutifs à une rupture au niveau familial ou amoureux. Normalement, c'est aux agents d'insertion et de probation d'annoncer au détenu les nouvelles difficiles, telles que le décès d'un proche, mais avec les téléphones en cellule, ils encaissent parfois cela sans que l'on puisse aider à amortir le choc", déplore Anne Gourrier, précisant que l'âge moyen de ces victimes était de 42 ans.

"Le passage à l'acte se construit, du moment où l'idée effleure le détenu jusqu'au moment de la cristallisation, quand il ne pense plus qu'à cela, décrit Philippe Peyron. Les surveillants sont formés à repérer ces changements d'attitude, d'autant qu'il arrive que juste avant l'acte, la personne soit tellement apaisée par l'idée d'en finir qu'elle redevient normale et donc encore plus difficilement détectable."

L'an dernier, 72 % des 120 détenus qui ont emprunté cette échappatoire en France l'ont fait en maison d'arrêt (16 % dans le quartier des arrivants et 15 % en quartier disciplinaire, Ndlr), là où ils sont prévenus en attente d'un jugement, ou condamnés à une peine inférieure à deux ans. "La première semaine se passe au quartier des arrivants. Rapidement, le détenu passe un grand nombre d'entretiens, notamment avec un psychologue si le besoin s'en fait tout de suite sentir, explique Philippe Peyron.

Mais l'incertitude du procès qui arrive, le choc de l'incarcération et la réalisation des faits commis, notamment pour les auteurs d'infractions de moeurs particulièrement touchés par le suicide, font qu'il faut être extrêmement vigilant. Pour un suicide, les études montrent que nos personnels permettent d'en éviter sept à huit..."

La Provence

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