Un ancien surveillant de la maison d’arrêt d’Osny a été condamné à trois ans de prison dont un avec sursis pour avoir fait entrer illégalement des téléphones portables et de la drogue pour le compte de plusieurs détenus.
Il explique son geste par des menaces qu’il a reçues mais également par appât du gain.
Il le reconnait. Nicolas L., ancien surveillant de la maison d’arrêt d’Osny, a fait entrer illégalement dans l’établissement et pour le compte de plusieurs détenus des téléphones portables, chargeurs, mais aussi de la drogue.
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Pour ce trafic qui a duré plus d’un an et qu’il réalisait en échange de sommes d’argent, il a été condamné ce lundi par le tribunal correctionnel de Pontoise, dans le Val-d’Oise, à trois ans de prison, dont un avec sursis, conformément aux réquisitions de la procureure.
Interpellé le 8 décembre 2014, le trafic a débuté l’année d’avant, en décembre 2013. Depuis près d’un an, Nicolas L. est affecté à la prison d’Osny. Ce n’est pas par choix qu’il a travaillé dans l’établissement du Val-d’Oise, récemment théâtre d’une violente agression où deux surveillants ont été blessés par un détenu de l’unité dédié. Originaire du Nord, il est obligé de s’installer dans un logement collectif où résident plusieurs autres collègues dans un quartier où vivent des familles de détenus.
Colis contre rémunération
Rapidement, selon lui, des "jeunes qui le connaissent" l’ont abordé, raconte l’ex-surveillant devant le tribunal. La commande est simple: en échange d’une rémunération, il devait livrer des colis à certains détenus.
"Ils étaient plusieurs, j’étais nouveau dans le logement collectif, détaille Nicolas L.. Ils sont venus me voir deux fois. J’ai refusé au début, puis j’ai accepté au bout d’un mois. A la base, c’était par appât du gain."
Sa seule limite a été de ne pas faire entrer d’armes. Les aveux de cet homme qui a passé 13 mois en détention provisoire, laissent perplexe la cour. "Un mois, c’est vite réfléchir, ironise la présidente du tribunal. On n’est pas torturé." Mais Nicolas L. lui oppose les menaces qu’il assure avoir reçues. Des menaces contre lui, mais aussi contre sa compagne.
Il détaille également la liste de ses dépenses que son salaire de surveillant pénitentiaire ne suffisait pas à supporter. "Si ça pouvait m’aider dans la vie de tous les jours, je prenais", admet-il, non sans gêne. "Ma crainte était là, confie Nicolas L.. Quand je me suis fait prendre, j’étais soulagé."
Moins de 1.000 euros en six mois
Face à lui, ceux qu’il accuse de l’avoir fait "travailler" pour leur compte, jugés et condamné, pour l'un, relaxé, pour l'autre, pour acquisition, détention, transport et offre ou cession de stupéfiants.
D’abord Tarik Merrouche. Lui a été condamné pour braquage avec violences. Ce sont ses proches qui auraient abordé le surveillant. Il lui aurait fait passer sept téléphones et quelques barrettes de cannabis. En échange, l’ancien personnel de l’administration pénitentiaire a reçu entre 150 à 200 euros par colis.
"On ne voit pas vraiment l’intérêt pour l’appât du gain", ironise la présidente du tribunal au vue des sommes perçues. Moins de 1.000 euros en six mois jusqu’au début de l’été 2014.
"En accusant mon client, cela lui permet de donner une date à ses agissements", dénonce Me Rubben, avocat de Tarik Merrouche qui estime que ce trafic a débuté bien avant décembre 2013, soit moins d’un mois après l’arrivée de son client à Osny. "Le dossier repose uniquement sur les déclarations d’un détenu soupçonné d’être à la tête d’un trafic actif." Pour lui, l’enquête n’a pas apporté d’"éléments objectifs" contre son client. Pour les faits d'acquisition, de détention et de transport, entre autre, de stupéfiants, Tarik Merrouche a été relaxé.
La défense a été la même du côté de Souleymane Traoré. Des arguments qui ont peu convaincu: il a écopé de quatre ans de prison, sur les cinq requis. Cet autre détenu aurait lui menacer Nicolas L. de le "dénoncer" s’il ne faisait pas entrer des colis pour son compte. La rémunération était plus élevée même si elle se faisait selon l'humeur du détenu, assure le surveillant, de "500 à 1.800 euros". "Qu’est-ce qui vous faisait penser qu’il avait des preuves?", doute la procureure. "Je n’osais rien dire", reconnait l’ancien surveillant.
"Passoire"
C’est sur cette personnalité qu’elle juge fragile que l’avocate de Nicolas L. a insisté. "Il a été instrumentalisé, assure Me Djidjirian. Tout le monde a profité de lui." Interrogé par la présidente du tribunal sur son rôle de pivot, Nicolas L. le reconnait volontiers: "Sans moi, oui rien ne se fait, mais ça aurait pu être quelqu’un d’autre." Il fait part alors de ses suspicions à l’égard d’autres surveillants. "Les téléphones que l’on retrouve, on les revend", décrit-il.
"Beaucoup de choses circulent en prison, le jet de colis ne permet pas de tout expliquer", s’indigne la présidente. Car ce témoignage et ce procès sont aussi l’occasion d’appréhender ce que certains qualifient de "passoire". Car pour faire entrer les colis, des petits paquets bien soigneusement emballés dans du film plastique, Nicolas L. n’avait qu’à les mettre dans sa veste. Veste qu’il ne faisait pas passer sous le portique de sécurité sous lequel tous les surveillants doivent passer en début de journée. "La nuit ou le matin tôt souvent le collègue est seul", conclut-il.
Bfm TV
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