Sur le grand écran installé désormais tout près de la chaire du procureur, apparaît la mine déconfite de Jordan, 25 ans, en direct live de la prison de Châteauroux.
Son défaut, à Jordan, c’est qu’il entasse. Des téléphones portables, de l’argent, des lames de couteaux en céramique, un couteau de cuisine, des lames de scie… dans un endroit où il est suspect et surtout interdit de s’en servir : sa cellule !
En mars 2017, il était alors écroué à la maison d’arrêt de Blois et s’était fait bêtement piéger par un ratissage méticuleux de son logis à barreaux.
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Certes, les avocats ne vous diront pas le contraire, on trouve de tout en prison mais, là, tout de même, le président du tribunal, Denys Baillard, en reste coit : « Vous les avez trouvés où, ces couteaux ? ».
Pour celui de la cuisine, le prévenu réplique qu’il s’est servi sur un plateau. Pour le reste… « Pendant une promenade, on m’a proposé de garder les objets en échange d’un téléphone portable pour appeler ma famille. Après, je ne voulais plus, mais on m’a menacé et même de s’en prendre à ma femme. »
Le président a l’œil dubitatif : « Et l’argent ? » Jordan jure qu’on lui a demandé aussi de cacher les billets : « On m’a pris pour un bouffon, j’ai pas su dire non, je ne connaissais pas bien les règles de la prison. »
Le juge épluche son casier et lui rappelle un petit séjour à Fleury-Mérogis pour vols… « J’suis sorti au bout de 3 mois, pas eu le temps de m’intégrer ! »
Le juge en exhume un autre : « Encore 4 mois de prison, là aussi, pour des vols. Pas assez long, le séjour non plus, j’imagine… »
Jordan change de stratégie : « J’ai volé tout jeune avec mes parents, je n’ai rien connu d’autre. » Le président s’inquiète de savoir s’il a un travail : « Ben, j’ai été beaucoup voleur ; du coup, j’ai pas pu. » Lucide, au moins.
Puis Jordan se met à parler de sa volonté de réinsertion. Il a passé trois diplômes depuis son transfert dans les geôles de Châteauroux dont son brevet des collèges et un CAP de vente : « On m’a bien conseillé, ça m’a remis dans les clous. »
Le magistrat apprécie. « Normalement, l’administration pénitentiaire règle en interne ce genre problème mais, là, vu l’ampleur, elle a porté l’affaire au tribunal ; ça profitait à toute la prison », précise la représentante du parquet. « Et puis, les couteaux, c’est dangereux, et ceux-là, c’était pas pour faire la cuisine ! »
Elle requiert alors six mois ferme pour « faire cesser ces pratiques ». Plaidant pour la défense, Me Sarah Leveque tempère les ardeurs du ministère public : « Il a grandi au milieu de la délinquance. Il a déjà été puni en prison pour ces faits, fouille intégrale systématique, 25 jours en quartier disciplinaire, trois mois en isolement… Ne découragez pas sa réinsertion ! »
Le tribunal a ramené la peine à quatre mois ferme. Avec une sortie prévue en 2019, il peut tenter le bac.
La Nouvelle République
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