La mobilisation des surveillants du centre pénitentiaire de Condé-sur-Sarthe ne faiblit pas au 8e jour de blocage. Rencontre avec Cédric sur le piquet depuis le premier jour.
Il aime passionnément la photo. Et prend finalement un certain plaisir à mettre son talent à exécution au pied du piquet de grève qui bloque l’accès au centre pénitentiaire d’Alençon-Condé-sur-Sarthe.
« Je suis là tous les jours, dès 4 h 30 du matin, depuis mercredi 6 mars et je fais un dossier photo par jour. De toutes ces photos, j’en ferai un montage vidéo avec de la musique film pour Olivier et Yannick et tous les collègues, en souvenir ».
Yannick et Olivier sont les deux surveillants qui ont été blessés lors de l’attaque terroriste du détenu radicalisé, Michaël Chiolo, et de sa compagne, mardi 5 mars, dans l’Unité de Vie familiale de l’établissement pénitentiaire.
Les surveillants ont, depuis, refusé de reprendre leur travail et réclament, comme ils le font régulièrement depuis l’ouverture de cette centrale en avril 2013, des moyens supplémentaires pour « travailler correctement et en sécurité »
« Je ne trouvais pas de boulot dans le coin ! »
Au pied du feu, alimenté par des pneus, des palettes, des cartons et même un piano, ce mercredi 13 mars – 8e jour de blocage du centre pénitentiaire- Cédric fait défiler ses nombreux clichés compilés sur son téléphone, depuis le premier jour de la mobilisation. Sans s’auto-complimenter pour autant.
Car il ne perd pas de vue le sens de sa présence, ici :
« C’est grave ce qui s’est passé et c’est important qu’on soit là tous les jours ! Pour que ça change. Il nous faut des moyens matériels mais surtout de nouvelles procédures qui ne vont pas que dans le sens des détenus. »
Natif de Seine-Saint-Denis, il a travaillé, pendant dix ans, pour des bailleurs sociaux à Aubervilliers. L’amour l’a conduit dans l’Orne. « Et comme je ne trouvais pas de boulot dans le coin, j’ai décidé de passer le concours d’entrée dans la pénitentiaire après avoir vu des annonces de recrutement ».
De l’extérieur, le métier lui semblait attirant « parce que j’aime la communication ». Au final, après deux ans d’exercice au centre pénitentiaire d’Alençon, il se révèle être « une véritable vocation ! »
« On ne naît pas fondamentalement mauvais ! »
« J’ai passé dix ans de ma vie à me faire cracher dessus et insulter par des locataires. Maintenant, c’est par des détenus et leurs familles. C’est un peu pareil ! Mais ça me passionne quand même comme métier parce que j’aime le contact humain… Et il y a aussi beaucoup de misère humaine en prison. Les détenus sont des gens accidentés, c’est compliqué. Je dis toujours qu’on ne naît pas fondamentalement mauvais : on le devient ! »
Mais ce père de famille de 34 ans convient que l’exercice de ce métier de surveillant dans cette centrale est néanmoins particulier. « Avec la législation du moment, il faut caresser les détenus dans le sens du poil ! Et nous, ça nous affecte. On est là à se faire insulter en permanence par des gens qui nous manquent de respect ».
« On peut se faire taper dessus juste parce que le détenu n’a pas la marque du poulet qu’il avait commandé ! Je sais de quoi je parle : j’ai eu une réclamation parce que le poulet qu’avait commandé le détenu n’était pas exactement du poids demandé ! On lui a changé le poulet ! »
Des situations de ce genre, il en compile aussi beaucoup… dans sa mémoire de jeune surveillant. Mais pas de quoi le faire renoncer à son métier.
« La première fois que je suis arrivé dans la région, je suis passé devant ce centre pénitentiaire. Je ne savais même pas qu’il y avait une prison ici. Maintenant, je travaille dedans et j’entends bien y rester jusqu’à la fin de ma carrière ! », annonce le surveillant qui attend donc beaucoup de la rencontre entre les syndicats et la ministre de la Justice, demain, jeudi 14 mars.
Pour pouvoir continuer à exercer sa profession avec le même engouement « et en toute sécurité ».
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