Jean-Jacques Urvoas a été nommé pour remplacer Christiane Taubira au ministère de la Justice. Cette promotion fait les affaires de Manuel Valls, dont il est l’un des fidèles.
Le gouvernement a-t-il désormais deux ministres de l’Intérieur ? C’est l’impression que peut donner la nomination du socialiste Jean-Jacques Urvoas au poste de garde des Sceaux à la place de Christine Taubira, qui a démissionné mercredi 27 janvier.
Le "Monsieur Securité" du PS succède donc à la "dernière caution de gauche" du gouvernement. Le contraste entre le député du Finistère fidèle à la ligne de Manuel Valls et la championne du tweet poétique qui n’a jamais caché ses divergences avec le Premier ministre est plus qu’une affaire de style.
Sécurité, sécurité et renseignement
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Pour le grand public, Jean-Jacques Urvoas est avant tout le rapporteur de la loi sur le renseignement, qualifiée de "Patriot Act" à la française par ses détracteurs, en référence à la loi antiterroriste adoptée par les États-Unis après les attentats du 11 septembre. Sa nomination est "consternante pour les personnes qui sont soucieuses des libertés publiques en France", assure sur France 24 le politologue Thomas Guénolé.
Ce fils de militaire n’est pas devenu par hasard le père spirituel de l’une des lois les plus controversées du quinquennat de François Hollande. Sa réputation de spécialiste des questions de sécurité et de défense est bien établie au Parti socialiste depuis que Martine Aubry, alors secrétaire générale du parti, en a fait le spécialiste maison de cette problématique en 2009.
À l’Assemblée nationale, non content de présider la puissante commission des lois, il est également le chef de la délégation parlementaire sur le renseignement, participe à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), l’autorité de contrôle des activités de surveillance.
C’est donc tout logiquement que Manuel Valls, qui se présente comme le champion d’une gauche "décomplexée" en matière sécuritaire, a fait de Jean-Jacques Urvoas l'un de ses proches conseillers. Les deux hommes collaborent depuis 2011. L’actuel Premier ministre a même tenté d’imposer son ami à l’Intérieur en avril 2014, mais François Hollande lui avait préféré Bernard Cazeneuve.
L’ami des députés
Le ministère de la Justice n’est pas qu’un lot de consolation permettant à Manuel Valls de remplacer une voix discordante par un fidèle. Jean-Jacques Urvoas est aussi professeur de droit et son action à la commission des lois de l’Assemblée lui a valu des louanges aussi bien à droite qu’à la gauche de la gauche, rappelle Libération. Il partage, en outre, avec Christiane Taubira un fort intérêt pour la réforme pénitentiaire. Ce Breton revendiqué reverse ainsi 15 000 euros de sa réserve parlementaire à l’Observatoire international des prisons, un organisme plutôt classé à gauche.
Présenter Jean-Jacques Urvoas comme l’antithèse politique de Christiane Taubira est un résumé insuffisant. Sa nomination répond également à une autre urgence pour François Hollande : réconcilier le gouvernement avec l’Assemblée nationale où les députés de gauche ont de plus en plus de mal avec la ligne Valls-Macron.
Sur tous les grands dossiers controversés de ces derniers mois, Jean-Jacques Urvoas a assuré le service après-vente du gouvernement. Il est "le candidat naturel à démerder l’indémerdable", résume pour Le Monde un député socialiste. Loi sur le renseignement, sur la prolongation de l’État d’urgence et, finalement, sur la déchéance de nationalité : Jean-Jacques Urvoas est en première ligne sur tous ces dossiers.
À chaque fois, le député du Finistère réussit à faire accepter les textes en minimisant les dégâts politiques pour l’Élysée. Mieux : son exercice d’équilibriste politique lui vaut un respect de tous ou presque au Parlement. "Habile", "sympa", "bosseur" sont quelques uns des qualificatifs choisis par des députés interrogés à son sujet et rapportés par les journalistes de Médiapart. Avec Jean-Jacques Urvoas, le duo Hollande-Valls s’est donc offert les services d’un fidèle qui sait ménager et amadouer les parlementaires. Qui dit mieux ?
France 24
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