Le gardien, victime du chantage d'un détenu, était mis en cause pour avoir fait entrer téléphones et cannabis dans la maison d'arrêt de Perpignan.
Comment un surveillant, qui a déjà derrière lui une longue carrière dans l'administration pénitentiaire, a-t-il pu se retrouver dans le box des prévenus du tribunal correctionnel de Perpignan ?
En décembre 2014, la direction de la prison de Perpignan met au jour un trafic de téléphones portables et de cannabis dans ses murs.
Un agent en charge de la surveillance des parloirs ferait entrer les objets.
Trois détenus le mettent en cause. Les éléments qu'ils donnent sont vérifiés et semblent très plausibles.
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D'après les témoins, le surveillant incriminé était sous le charme de la compagne d'un jeune détenu. Il la faisait passer devant tout le monde et aurait fini par lui donner son numéro de téléphone.
La jeune femme s'en ouvre alors à son compagnon. Celui-ci se rend immédiatement compte qu'il peut tirer parti de la situation.
Se faisant passer pour son amie, il envoie des textos au surveillant et lui donne rendez-vous. La jeune femme, accompagnée d'une amie, retrouve le gardien sur un parking près de chez elle. Le trio part faire une promenade en voiture. La scène est filmée par l'accompagnatrice.
La condamnation cachée du gardien
Rien de vraiment compromettant. Si ce n'est que fréquenter la femme d'un détenu n'est pas vraiment déontologique lorsque l'on est membre de la "pénitentiaire".
De plus, le gardien a été condamné en 2012 à un an de prison avec sursis. Sa direction ne le sait pas. Il craint qu'une plainte du détenu n'exhume cette ancienne condamnation. Il perdrait son emploi.
Alors il cède au chantage du prisonnier. Ce dernier affirme qu'il a fait entrer, dans le linge apporté par les familles, une dizaine de téléphones et quelques grammes de cannabis. "Non !, dénie le gardien. J'ai seulement déposé les colis à quelques centaines de mètres de l'établissement.
Je ne sais pas comment, par la suite, on les y a fait entrer." "Il était terrorisé par le chantage, mais il n'aurait fait que transporter les objets jusque devant la prison ! ?, tonne le procureur. Là où n'importe quel ami du détenu aurait pu les déposer. Cela n'a aucun sens. Une multitude de témoins l'accuse." Il requiert 15 mois contre le gardien. 10 mois contre le maître chanteur et 6 mois contre sa compagne, complice.
"Une rumeur courait que ma cliente avait une relation avec un gardien, plaide l'avocat de la jeune fille, Me Gregone. Pour prouver sa bonne foi à son compagnon, elle a accepté de compromettre le gardien."
Me Dupetit, à la tâche la plus difficile, il défend le surveillant : "Mais enfin, les détenus n'ont pas besoin de gardien pour faire entrer des objets. La preuve est que ce prisonnier avait déjà un téléphone en sa possession bien avant les faits. De plus, qui me prouve que les objets, déposés près de la prison, y sont entrés par la suite ? En accusant le surveillant, le détenu protégeait sa véritable source d'approvisionnement."
Quant au comportement du détenu, Me Traiai, l'explique en ces termes : "Comme la direction de la prison ne l'écoutait pas quand il se plaignait des avances faites à sa compagne par un gardien, il a pris les choses en main. Il l'a compromis pour pouvoir le dénoncer à l'administration. Ce n'est pas du chantage."
Le tribunal estime pourtant chaque prévenu coupable. Le gardien est condamné à 15 mois de prison et il lui est définitivement interdit d'exercer sa profession. Le détenu écope de 10 mois, sa compagne de six mois. Des sanctions dont le juge d'application des peines estimera les modalités d'exécution.
L'indépendant
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