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mercredi 30 mai 2018

Suicide d’un surveillant réunionnais : deux députés de La Réunion mettent en cause l'Administration Pénitentiaire

Huguette Bello et Jean-Hugues Ratenon ont tour à tour interpellé le gouvernement à l’Assemblée nationale sur la situation de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis après le suicide d’Alexandre Gonneau, un surveillant reunionnais. 

Suicide d’un surveillant réunionnais : deux députés de La Réunion mettent en cause l'Administration Pénitentiaire

La ministre de la Justice leur a répondu.



Pour Huguette Bello (Gauche démocrate et républicaine) "L’émotion est vive à Fleury-Mérogis et à La Réunion où Alexandre Gonneau voulait repartir vivre et travailler. Ce 22 mai, ce jeune homme de 27 ans s’est suicidé, poursuit la députée à l'Assemblée nationale.

Originaires d'Outre-mer

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Elle ajoute :  "Dix jours plus tôt, l’une de ses collègues avait mis fin à ses jours. Dans l’intervalle, un gardien avait été blessé par un détenu radicalisé".

Tous trois travaillaient au centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis. Tous trois sont originaires des Outre-mer. Ces drames renvoient aux conditions de travail des surveillants pénitentiaires où une surpopulation carcérale en augmentation constante, un personnel en sous-effectif chronique ont fini par provoquer un climat de violence et d’insécurité inouïe

- Huguette Bello

Une longue maladie

Face à ces affirmations, la ministre de la Justice précise d'abord la situation de la surveillante qui s'est suicidée quelques jours avant Alexandre Gonneau.

Vous avez parlé d’une surveillante qui a mis fin à ces jours une semaine environ avant la disparition de M. Gonneau. Elle était atteinte d’une longue et douloureuse maladie et son entourage a demandé expressément à notre administration d’être silencieuse.

- Nicole Belloubet, ministre de la Justice

"Management toxique"

Huguette Bello estime de son côté que "ces drames font aussi s’interroger sur des méthodes de management qualifiées de toxiques par celles et ceux qui les subissent et qui dénoncent la pression insoutenable qu’on leur impose"

Avant de se jeter du pont Tancarville, Alexandre a donné plusieurs signes d’alerte. Après une agression dégradante de la part d’un détenu du quartier disciplinaire, il n’a même pas bénéficié du protocole de prise en charge prévu. Personne ne l’a accompagné à l’examen médical. Il a du se présenter seul à l’hôpital. Quinze jours d’arrêt maladie lui ont alors été prescrits pour cause de burn-out. Il ne terminera jamais sa première journée de reprise 

- Huguette Bello 


Une agression

Nicole Belloubet précise à l'Assemblée nationale ce qu'elle sait des faits concernant Alexandre Gonneau :

Alexandre Gonneau a été la victime collatérale d’une agression contre un détenu et il s’est trouvé atteint par un jet de liquide. Il n’a pas voulu porter plainte immédiatement et c’est sa hiérarchie et ses collègues présents qui ont dû insister pour qu’il accepte de déclarer l’incident comme accident du travail. Il a alors fait l’objet de l’accompagnement qui s’impose et il n’a pas jugé immédiatement nécessaire d’être accompagné à l’hôpital.

- Nicole Belloubet


La plus grande prison d'Europe

"Fleury-Mérogis est la plus grande prison d’Europe. Elle est celle où sont affectées de très jeunes fonctionnaires", déclare Huguette Bello qui conclut sa question par ces mots : "Les personnels comme leurs familles comptent sur vous Madame la ministre pour faire toute la lumière sur ces suicides. Tous vous demandent de tirer les leçons de ces drames".
La question des suicides

La ministre affirme enfin qu'elle a bien conscience des conditions de travail dans l'univers carcéral. "L’administration pénitentiaires eu égard aux conditions de travail carcéral travaille depuis de longues dates sur la question des suicides, ajoute-t-elle. Un accompagnement pluridisciplinaire autour d’un réseau de psychologues a été mis en place, des réseaux de formation et d’information ont été déployés et des travaux sont conduits sur les rythmes de travail et sur la qualité de vie au travail. Vous pouvez compter sur mon engagement personnels pour que ces questions collectives ne débouchent pas sur des souffrances personnelles", conclut-elle.

Les paroles d'Elodie

Un peu plus tôt, le député Jean-Hugues Ratenon (France insoumise) avait lui aussi interpellé la ministre de la Justice.  Sur un ton plus véhément que sa collègue Huguette Bello, il a commencé son témoignage en citant les paroles de la compagne d’Alexandre Gonneau. "Il a sauté d’un pont en tenue de travail, c’est symbolique. Ça veut dire, je saute pour montrer que c’est mon travail qui m’a tué, mais pas le reste, ce sont les propos d’Elodie, la compagne d’Alexandre", déclare le député qui cite aussi le père du surveillant quand il disait : "Mon fils est un héros".

Alexandre Gonneau jeune réunionnais de 27 ans a choisi le suicide pour attirer les projecteurs sur le sort de ses collègues de travail. Dix jours avant c’était Natacha, mère de famille de 40 ans qui se suicidait. Ces deux fonctionnaires ultramarins travaillaient à Fleury-Mérogis. A cela il faut ajouter sept suicides de détenus qui eux aussi méritent l’attention.

- Jean-Hugues Ratenon, député de La Réunion. 

Les réseaux sociaux

La ministre de la Justice, Nicole Belloubet a répondu au député de La Réunion en exprimant en tout premier lieu sa compassion à l’égard des familles qui ont connu un tel drame en ajoutant :

Je crois M. le député qu’il faut être extrêmement vigilant à l’égard des informations qui circulent sur les réseaux sociaux.

Fleury-Mérogis et l'esclavage

Jean-Hugues Ratenon poursuit son intervention en interpellant le gouvernement sur la situation de Fleury-Mérogis, en y mélant la question de l'esclavage.

Les syndicats ne cessent de tirer la sonnette d’alarme, déclare le député. A Fleury-Mérogis, 60% du personnel vient des Outre-mer. Nos jeunes arrivent ici à cause du chômage de masse, mais le désenchantement arrive vite, trop vite. Pour l’administration pénitentiaire les Outre-mer sont une chance comme l’était pour la France l’esclavage avant 1848

- Jean-Hugues Ratenon. 


"Gestion coloniale"

"Il est temps de mettre fin à la gestion coloniale des Ultramarins dans la fonction publique, ajoute le député de La Réunion. Il faut tout faire pour permettre aux Ultramarins de travailler dans leurs territoires. En février 2018, l’administration pénitentiaire  a annoncé la création d’un groupe de travail sur la question ultramarine. Qu’en est-il aujourd’hui ?"

La réponse de Nicole Belloubet

Pour répondre à la question du député, Nicole Belloubet affirme avoir pris trois dispositions. Le projet de loi de programmation qui  vise à "faire diminuer la surpopulation carcérale". "Nous savons que c’est un des éléments de la difficulté d’exercice des personnels pénitentiaire", ajoute-t-elle.

La seconde réponse résulte dans le protocole d’accord que nous avons signé en janvier dernier avec l’une des organisations syndicales représentatives et qui contient pour les personnels de surveillance des mesures de sécurité très précieuses. La troisième consiste dans la mise en place d’un groupe de travail sur les risques psycho-sociaux mis en place en mars dernier.

- Nicole Belloubet

Le corps d'Alexandre Gonneau a été retrouvé

Le corps du surveillant réunionnais a été retrouvé mardi 29 mai vers midi. Il était en tenue de travail. Le commissariat de Beuzeville est chargé de l'enquête.

Outre mer 1




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