«On est obligés d’installer des matelas à même le sol, confie un surveillant. Et aussi d’envoyer au mitard des prisonniers car ils refusent de dormir par terre…»
Inscrit dans la loi depuis 1875, le principe de l’encellulement individuel n’est toujours pas prêt d’être appliqué. La France est même dans l’illégalité depuis le 25 novembre, date à laquelle un moratoire lui permettant de déroger à ce principe a pris fin.
>> Les faits: La France hors la loi au sujet de ses prisonsManuel Valls a donc missionné en urgence le député (PS) de Loire-Atlantique Dominique Raimbourg afin qu’il formule des propositions pour enfin atteindre l’objectif d’un détenu par cellule. 20 Minutes fait le point sur la situation dans les prisons françaises.
Pourquoi la France est-elle hors la loi?
Acté dès 1841 par les autorités, le principe de l’encellulement individuel a même été inscrit dans la loi de 1875. Il a été rappelé dans les lois pénitentiaires de 2000 puis 2009 avec la mise en place d’un moratoire de cinq ans permettant au gouvernement de s’organiser. Ce moratoire ayant pris fin le 25 novembre 2014, la France est depuis hors-la-loi.Quel est le taux de surpopulation carcérale?
Au 1er novembre, la France comptait 66.530 détenus selon les statistiques de l’administration pénitentiaire pour 57.860 places opérationnelles, soit un taux d'occupation de 114,9%. Mais il faut savoir qu’il n’y a que 49.681 cellules. «De fait, certaines cellules (au nombre de 6.653) sont prévues pour accueillir deux prisonniers, d’autres sont carrément des dortoirs collectifs», confie Dominique Raimbourg, le député PS chargé de rendre un rapport ce mardi, qui estime donc que le problème est aussi «architectural».Les détenus peuvent-ils engager des recours?
Oui. «Une fenêtre de tir vient de s’ouvrir», a même réagi Etienne Noël, avocat spécialisé dans la défense des détenus. Chaque prisonnier qui ne bénéficie pas d’une cellule individuelle peut, aujourd’hui, attaquer l’Etat devant le tribunal administratif à ce sujet. L’avocat explique aussi que cela pourrait faire l’objet de débats contradictoires lors des comparutions immédiates si l’on condamne une personne à rejoindre un établissement surpeuplé. Selon le quotidien Le Monde, la Chancellerie aurait même provisionné 20 millions d'euros pour indemniser les détenus qui l'attaqueraient.Pourquoi ne pas instaurer un numerus clausus?
C’est une idée prônée par Adeline Hazan, le Contrôleur des lieux de privation de liberté mais aussi par certains syndicats comme le Syndicat de la magistrature. L’idée, selon le principe des vases communicants, serait d’accélérer la sortie d’un prisonnier détenu chaque fois qu’un autre serait condamné. Contacté par 20 Minutes, Dominique Raimbourg a refusé de révéler les détails de son plan, tout en confiant que c’était «une idée».Pourquoi ne pas construire de nouvelles prisons?
Votée avant l’été, la réforme pénale de Christiane Taubira a déjà prévu de construire 6.500 nouvelles places de prison. Ce ne sera pas suffisant. «Mais l’idée, c’est aussi de penser la prison autrement, estime Dominique Raimbourg qui privilégie plutôt, comme le texte de la ministre de la Justice, la mise en place d’aménagements de peines. En 2012, Nicolas Sarkozy avait promis la construction de 80.000 places s’il était élu. Le coût de la construction d’une place de prison est estimé à un peu plus de 100.000 euros.Quelles sont les autres idées?
Selon nos informations, Dominique Raimbourg devrait proposer ce matin d’accorder un jour de réduction de peine à tous les détenus ayant passé dix jours dans une prison surroccupée.
Instaurer une sorte de retard dans la mise à l’exécution des peines est également l’une des idées avancées dans le monde pénitentiaire. Mais Dominique Raimbourg n’y est pas vraiment favorable. «Attendre qu'une cellule se libère pour envoyer quelqu’un en prison est risqué, confie-t-il. Donnée en retard, la sanction perd de son sens.»
Source : 20 Minutes
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