mercredi 10 octobre 2018

Google promet à Belloubet de flouter les prisons d'ici décembre

Depuis l'évasion de Redoine Faïd, la garde des Sceaux demandait à Google de retirer ses photographies aériennes de nombreuses prisons françaises. 

D'après nos estimations, au moins 51 d'entre elles sont toujours visibles sur le moteur de recherche. Mais aussi, sur certains sites de l'administration publique.



Après trois mois de passe d'arme, Google cède donc à la ministre de la Justice. Mardi soir, le porte-parole de la garde des Sceaux a annoncé au Figaro que le géant d'Internet lui avait adressé un courrier dans lequel il assurait que le floutage des prisons était bien en cours et qu'il serait terminé d'ici la fin de l'année. Nicole Belloubet lui en faisait la demande depuis juillet, à la suite de l'évasion de Redoine Faïd.

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Le 1er juillet, lorsque le braqueur multirécidiviste effectue une spectaculaire évasion de la prison de Réau en Seine-et-Marne à bord d'un hélicoptère, les enquêteurs comprennent rapidement que le centre pénitentiaire est visible directement depuis Google Earth. Cette fonctionnalité du moteur de recherche permet de voir une cartographie du monde entier en vues aériennes. Si l'internaute effectue plusieurs zooms, il peut distinguer nettement les différents bâtiments qui composent la prison, les terrains de football, les cours ou les enceintes.

Une anomalie, alors que Réau appartient aux «zones interdites à la prise de vue aérienne par appareil photographique, cinématographique», selon l'arrêté inscrit au Journal officiel du 31 octobre 2017. D'après les vérifications du Figaro, 51 établissements pénitentiaires appartenant à cette liste ne sont pas floutés sur Google Earth. Parmi eux, des maisons centrales accueillant des détenus dangereux comme celle de Poissy (Yvelines) ou d'Ensisheim (Haut-Rhin). À l'inverse, d'autres prisons sont bien floutées comme l'exige le décret, notamment celle de Fleury-Mérogis où se trouve notamment Salah Abdeslam, le seul survivant du commando des attentats du 13 novembre à Paris.

Des images de «fournisseurs extérieurs, publics ou privés»

«J'ai écrit à Google pour demander qu'il y ait des mesures qui soient prises pour retirer ces établissements pénitentiaires» des services de cartographie de Google, avait donc déclaré Nicole Belloubet au micro de RTL mardi matin, regrettant que ses demandes n'aient pas encore abouti. «Je vais demander à rencontrer les personnes qui sont en charge de ces questions-là. Je trouve que ce n'est pas normal que des établissements sécurisés comme nos prisons se retrouvent sur internet», avait-elle fait savoir.

De son côté, le porte-parole de Google France avait réagi auprès de l'AFP en insistant sur le fait que Google Earth et Google Maps agrègent des images «qui proviennent de divers fournisseurs extérieurs, publics ou privés.» L'entreprise assurait avoir transmis à ses fournisseurs «une liste de sites sensibles, en leur demandant de prendre les mesures nécessaires afin de nous transmettre des images conformes à la législation en vigueur dans les plus brefs délais.»

La prison de Réau, aussi visible sur Géoportail

Après vérification, Google n'est pas le seul site à proposer des captures aériennes non floutées des prisons. Géoportail, interface publique de services de données géographiques, n'a pas flouté non plus la maison d'arrêt de Réau, pas plus que celle de Fleury-Merogis.

Contacté par téléphone, l'Institut National de l'Information géographique et forestière, par ailleurs ancien prestataire de Google, reconnaît l'aberration mais précise que «les modifications, afin de respecter l'arrêt sur les zones sensibles, sont en cours. Nous respectons cette demande légitime et sommes en contact avec les différents ministères concernés. Cependant, l'arrêt n'a pas de valeur rétroactive.»

De son côté, Youssef Badr, le porte-parole du ministère de la Justice s'était défendu auprès du Figaro dans l'après-midi en affirmant «qu'il n'est pas ‘armé' pour opérer des contrôles systématiques sur ce que mettent en ligne les diffuseurs de contenus sur Internet» et que c'est, de toute façon, aux acteurs de se conformer à l'arrêt. Il confirme aussi qu'un «travail interministériel» est en cours et qu'il «vise à formuler des propositions d'évolution du cadre juridique encadrant les prises de vues aériennes (...) que ce soit dans l'espace aérobie ou dans l'espace extra atmosphérique.»

Le Figaro 



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