mardi 25 février 2014

La rétention de sûreté critiquée par le contrôleur des prisons

Jean-Marie Delarue désapprouve la mise en œuvre de ce dispositif permettant depuis 2008, au nom de la dangerosité des personnes, de prolonger l'incarcération, par une période de soin dans un établissement fermé. Il dénonce un «alignement sur le régime carcéral».
 
Un seul centre socio-médico-judiciaire existe à ce jour. Il est implanté à la prison de Fresnes.
Un seul centre socio-médico-judiciaire existe à ce jour. Il est implanté à la prison de Fresnes.
             
La majorité n'y trouve rien à redire et s'en désintéresse. C'est peut-être pour cela que le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue a décidé de se saisir du sujet de la rétention de sûreté et d'en dresser le bilan, six ans après la loi qui l'a institué. L'avis a été publié mardi matin au Bulletin officiel. Jusqu'à présent, ce, n'a été appliqué qu'à quatre personnes seulement.

 Un seul centre d'ailleurs - dit centre socio-médico-judicaire - existe à ce jour, celui implanté à la prison de Fresnes. Il faut dire que ce type de suivi est réservé aux condamnés purgeant une peine de plus de quinze ans et a été particulièrement encadré par la loi et le Conseil constitutionnel. Ce dernier a interdit la rétroactivité de son application et doit être prévu dès l'arrêt de Cour d'assises. Autrement dit, rares sont les détenus qui seront concernés avant 2019. Seuls peuvent être concernés ceux d'entre eux qui ont tour à tour été soumis, au terme de leur peine, à une surveillance judiciaire et une surveillance de rétention - les obligeant à des soins - qu'ils n'auraient pas respectés. C'est cette inobservation qui peut les conduire à être placés dans un centre de rétention de sûreté. Et cela a été le cas pour les quatre personnes concernées.

Alignement sur le régime carcéral

Dans son avis le contrôleur des prisons, pose la question de la légalité de ces mesures au vu de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme: «Le Conseil constitutionnel a estimé que la rétention de sûreté en cas de manquement à la surveillance de sûreté pouvait être rétroactive. Je suis assez certain que si l'une des personnes concernées formait un recours devant la cour de Strasbourg sur ce fondement, elle gagnerait. Nous invitons donc le législateur à la plus grande vigilance sur ce sujet», affirme Jean-Marie Delarue.

Mais ce n'est pas le seul bémol, que pose le contrôleur des lieux de privation de liberté. Dans son avis, il regrette que le centre socio-médico-judiciaire de Fresnes n'ait rien à envier au régime carcéral «alors qu'il s'agit avant tout d'un lieu de soin. Tout le système repose là-dessus». Le directeur sanitaire de cet établissement, qui doit être dirigé à parité entre l'administration pénitentiaire et la santé, n'a jamais été nommé. «C'est donc l'administration pénitentiaire qui a pris le dessus. Elle fait ce qu'elle sait faire et l'on est bien obligé de constater qu'il y a un alignement sur le régime carcéral». Et Jean-Marie Delarue de «dénoncer l'absence de soin, l'absence de formation, d'activité, l'impossibilité de psychothérapie de groupe. Ils s'ennuient. Et ils sortiront comme ils sont rentrés, ce qui n'est pas le but». Et de s'inquiéter pour l'avenir, lorsque le dispositif concernera «quelques dizaines de condamnés» d'ici à 2019.

Le Figaro

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