lundi 24 novembre 2014

L’objectif d’un détenu par cellule n’est pas atteint

En 2009, le Parlement a donné cinq ans à l’État pour permettre aux détenus qui le souhaitent de bénéficier d’une cellule individuelle. À l’échéance de ce délai, on reste encore très loin de l’objectif.
Une cellule du centre pénitentiaire pour hommes de Vézin-Le-Coquet (Ille-et-Vilaine, d'une capaci...
 
Les détenus sont placés seuls en cellule, sauf s’ils demandent expressément l’inverse. Voilà ce que prévoit le code de procédure pénale depuis… 1875 ! Alors que la loi se voulait à l’époque punitive – il s’agissait de renforcer l’isolement – la réforme pénitentiaire de 2009 a consacré un droit à « l’encellulement individuel », donnant cinq ans aux pouvoirs publics pour lui donner corps.
Mais aujourd’hui, le compte n’y est pas. Seuls 38 % des détenus bénéficient d’une cellule individuelle alors que 85 % d’entre eux affirmaient ce désir lors des récents états généraux de la condition pénitentiaire.

> À lire : Notre dossier spécial sur la prison

Un nouveau moratoire

Christiane Taubira vient de proposer – comme ses prédécesseurs – un nouveau moratoire jusqu’à 2017. Sans ces reports successifs, l’État serait dans l’illégalité. Les détenus pourraient l’attaquer, ouvrant un contentieux évalué à 20 millions d’euros par an… Le Parlement avalisera donc sans ciller ce énième report. Seule nouveauté, le député socialiste Dominique Raimbourg, fin connaisseur du sujet, a pour mission de remettre ses propositions au gouvernement d’ici au 30 novembre.

Pour expliquer une telle inertie, plusieurs paramètres entrent en jeu. À commencer par les lois votées depuis le début des années 2000 qui ont eu pour effet d’accroître considérablement le nombre de prisonniers. « En dix ans, la population carcérale a augmenté de près 35 % », précisait récemment Christiane Taubira, pointant du doigt l’ère Sarkozy.

des records historiques

Le parc pénitentiaire n’ayant pas suivi le rythme, la surpopulation atteint des records historiques. À l’Observatoire international des prisons (OIP), on refuse de s’en tenir à cette raison conjoncturelle. « Ces moratoires à répétition attestent aussi du peu de cas qu’on fait des détenus, déplore Marie Crétenot, juriste à l’OIP. L’idée selon laquelle le quotidien en prison doit être dur, afin de faire passer aux délinquants le goût de revenir en prison, reste prégnante. »

À ces raisons de fond s’en ajoutent d’autres, plus techniques, liées aux difficultés d’anticipation. Il est en effet complexe d’évaluer les besoins à cinq ans, laps de temps nécessaire à la construction d’un nouvel établissement. D’un gouvernement à l’autre, les politiques pénales varient, et donc le nombre d’incarcérations… La loi pénale portée par Christiane Taubira devrait par exemple aboutir à leur diminution alors que l’adoption des peines planchers sous Nicolas Sarkozy les avait augmentées.

les demandes évoluent

Il reste aussi difficile de prendre en compte les attentes des détenus. « Tous ne souhaitent pas être seuls, loin de là », rappelle Antoine Danel, secrétaire national du Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP). « Pour certains, c’est très anxiogène. Et puis les demandes évoluent en permanence. »

Des commissions se tiennent continuellement au sein des établissements pour répartir les cellules en fonction des desiderata de chacun, de leur profil. « On propose des places seules aux plus fragiles, à ceux risquant d’être malmenés par les autres », explique le directeur. « Il nous faut faire du cas par cas, assure un surveillant. Un primo-délinquant doit parfois être davantage protégé qu’un multirécidiviste, même âgé de plus de 65 ans. »

Le SNDP se dit davantage favorable à la mise en place d’un numerus clausus en prison. « Cela consisterait, au-delà d’un certain seuil, à ne faire entrer en prison un détenu qu’en en ayant fait sortir un autre », précise Antoine Danel. Une idée portée par certains élus de gauche mais loin de faire l’unanimité.

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