Épinglée début mars par le Conseil de l’Europe, la surpopulation carcérale française est au cœur du dernier rapport d’activité du Contrôleure générale des lieux de privation des libertés (CGLPL) qui dénonce des situations demeurées semblables et des engagements non tenus.
Promiscuité, tensions, difficultés d’accès au travail et aux activités, insuffisance d’accès aux soins, dégradation des conditions de travail du personnel ... Les prisons françaises pâtiraient-elles d’une politique carcérale inadaptée ?
Car avec une densité moyenne de 115 détenus pour 100 places de prison, la France continue de crever le plafond à l’heure où, en Europe, la tendance est à la diminution de l’engorgement des établissements pénitentiaires.
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«Il n'est pas admissible que, dans tous les domaines qu'il contrôle, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté soit contraint de faire les mêmes constats, de dénoncer les mêmes manquements et de formuler les mêmes recommandations», dénonce Adeline Hazan, Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL).
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Dans son dernier rapport d’activité, Adeline Hazan qui s’inquiète d’un recul des « droits fondamentaux » au profit de l’ « impératif de sécurité », se dit également préoccupée par la place de mauvaise élève qu’occupe la France au sein de l’Europe. Dans une enquête parue le 8 mars dernier, le Conseil de l’Europe avait en effet placé la France au 7e rang des pays affichant le taux de surpopulation carcéral le plus élevé.
Une surpopulation chronique
« L’inflation carcérale est quasiment continue depuis 2000 », explique Marie Crétenot, juriste de l’Observatoire international des prisons (OIP). Selon elle, la réponse des gouvernements successifs visant à construire de nouvelles places de prison est inadaptée. Quant au développement de l’aménagement des peines, s’il est effectif, les politiques successives font état d’une forme de désinvestissement bien plus que d’une réelle promotion.
Ainsi, au 1er février 2016, la France comptait 67.362 personnes écrouées pour 58.787 places opérationnelles. La densité carcérale dans les maisons d’arrêt est telle qu’environ 1.200 détenus dorment sur des matelas posés à même le sol. Dans le reste des établissements français, la situation n’est pas moins dramatique. Les chiffres de l’administration pénitentiaire révèlent qu’au 1er janvier 2015, environ la moitié des établissements ou des quartiers pénitentiaires français possédaient une densité de population comprise entre 120% et 200%.
La faute à la Justice française pour qui l’emprisonnement reste la peine de référence, dénonce l’OIP. L’allongement de la durée des peines couplé à une multiplication des courtes peines, le tout dans un contexte d’accroissement général du nombre de condamnations prononcées, contribue à engorger durablement les prisons. Bien loin des solutions préconisées par la CGLPL et l’OIP qui voient dans le développement des alternatives à l’incarcération (peine de probation ou encore surveillance électronique) un moyen efficace de désengorger les prisons.
La réinsertion mise au placard
Alors que la durée moyenne passée sous écrou ne cesse d’augmenter, les mesures d’aménagements de peines restent encore marginales. Entre le 1er janvier 2016 et le 1er janvier 2015, celles-ci ont même diminué de 10,7%. Or ce type de mesures permettrait de réaliser des économies substantielles, selon un rapport du Conseil de l’Europe. Les expertises criminologiques montrent également que le taux de récidive est plus élevé pour les sortants de prisons que ceux bénéficiant de mesures alternatives à l’incarcération. Selon Marie Crétenot « si tous les condamnés à de courtes peines bénéficiaient de ce dispositif là, le problème de la surpopulation serait réglé ».
En réalité, tous les stades du processus pénal sont concernés par cette approche qui se veut plus répressive. Car si les peines d’emprisonnement ont pour fonction de punir, elles doivent aussi avoir un effet dissuasif et, à terme, viser la réhabilitation de la personne condamnée. Ce fragile équilibre est aujourd’hui mis en péril par la situation d’engorgement des prisons françaises qui ne sont plus en mesure d’accompagner les condamnés, s'inquiète l'OIP. Avec un taux d’incarcération qui continue de s’envoler, la France est en très mauvaise voie quant au respect de l’obligation légale d’encellulement individuelle prévue en 2019.
Politis
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