vendredi 18 juillet 2014

Portables en prison - réaction JF Forget

La contrôleuse des prisons est favorable à une certaine utilisation des portables en milieu carcéral.

Adeline Hazan, à Reims en janvier.
Adeline Hazan
A peine installée dans sa nouvelle fonction de contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan s’est déclarée jeudi sur France Inter plutôt favorable à l’utilisation des téléphones portables en prison. Mais dans un «cadre strict». Les appels avec ces mobiles pourraient par exemple être limités à un «certain nombre de numéros». L’ex-maire socialiste de Reims a invoqué la nécessité du «maintien des liens familiaux». Un argument déjà utilisé par son prédécesseur, Jean-Marie Delarue. Les défenseurs du portable en prison considèrent que le téléphone serait également bénéfique à la réinsertion.

Parloirs famille. Mais le sujet est sensible pour le personnel pénitentiaire. «Les téléphones fragilisent la sécurité de nos établissements», souligne Jean-François Forget, secrétaire général de l’Ufap-Unsa. Il rejette en bloc l’argument d’Adeline Hazan : «Le maintien des liens familiaux existe plus que jamais en prison aujourd’hui.» Et de citer pêle-mêle les «parloirs famille», les «autorisations de sortie» ou encore les mesures tendant à incarcérer les détenus à proximité de leur famille. En outre, le syndicaliste argue que des téléphones fixes sont déjà accessibles dans les prisons : «Ils peuvent appeler tous les jours ! Simplement, leurs conversations sont contrôlées, ce qui est normal dans un lieu de privation de liberté.»

Cette absence de confidentialité pose problème d’après François Bès, le coordinateur Ile-de-France et outre-mer de l’Observatoire international des prisons. Il pointe aussi le «coût élevé» de ces communications, qui fonctionnent à l’unité. «Ça peut atteindre plusieurs centaines d’euros par mois.» François Bès dit aussi que les postes ne sont souvent pas accessibles le soir, au moment où «les enfants sont rentrés de l’école, et la conjointe du travail». Et même lorsque les horaires correspondent, encore faut-il que la file d’attente ne soit pas trop longue.

Mounir Diari a passé un an dans une maison d’arrêt alsacienne. «Là où j’étais, on pouvait être jusqu’à une centaine pendant la promenade, qui dure deux heures. Et il y avait trois téléphones», raconte le trentenaire, aujourd’hui président d’une association œuvrant pour le droit des personnes dans l’univers carcéral baptisée J’veux m’en sortir. Il se souvient de la tension suscitée par les appareils, très convoités : «Il y a une forme de paranoïa qui s’installe. On attend près des téléphones quand la fin de la promenade approche. Chacun dit "c’est à mon tour".» Parfois, l’affaire se termine en bagarre, assure Mounir Diari. Et à ceux qui affirment que les mobiles faciliteraient les trafics internes et permettraient de monter des coups, il répond : «Il y a déjà des portables à l’intérieur !» Une réalité que personne ne nie. Adeline Hazan considère que c’est bien la preuve que «l’interdiction totale ne sert pas à grand-chose».

Crainte. Ce que conteste Jean-François Forget, du syndicat Ufap-Unsa. Il craint qu’en cas de levée de l’interdiction, les surveillants n’aient plus «aucun moyen de contrôle». Alors que le débat vient d’être relancé par la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, le ministère de la Justice n’entend pas bouger. A la chancellerie on explique que «la question de l’utilisation des téléphones portables en détention pose des problèmes de sécurité», et que «les détenus ont déjà accès au téléphone fixe en prison». Seule évolution envisageable : «L’opportunité de permettre l’utilisation de téléphones portables dans les quartiers de semi-liberté.»
Libération

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