Assesseur en commission de discipline comme simple civil, Nicolas Etienne est appelé à se prononcer sur les sanctions applicables aux détenus qui transgressent le règlement de la prison.
Là, il fait face à trois personnages : le chef de l'établissement pénitentiaire, un surveillant et une personne de la société civile. Car depuis 2011, monsieur tout le monde, ou presque, peut « siéger » en prison pour donner son avis sur les sanctions disciplinaires applicables.
Liens commerciaux :
Nicolas Etienne, 29 ans, est l'un des trois assesseurs volontaires intervenant à la maison d'arrêt yonnaise. « L'univers carcéral m'a toujours intrigué », glisse le boulanger de métier, qui avoue être guidé par sa curiosité. « J'avais envie de découvrir l'intérieur d'une prison. » Ça fait tilt quand son regard se pose sur une affiche placardée dans le hall du tribunal : « Justice citoyenne. Devenez assesseur en commission de discipline ».
Gérer le face-à-face avec les prisonniers
« J'ai adressé un CV et une lettre de motivation au président du tribunal de grande instance. » Quelques mois plus tard, le magistrat lui ouvre les portes de la maison d'arrêt.
Il faut montrer patte blanche pour mettre un pied en commission : être majeur, sans condamnation ou lien de parenté avec un détenu ou un personnel pénitentiaire, ne pas exercer un métier judiciaire ou des forces de l'ordre.
Nicolas Etienne fait des allers-retours en prison depuis deux ans. « J'ai couvert une quinzaine de commissions de discipline », à raison d'une semaine d'astreinte chaque mois, programmée en fonction des disponibilités indiquées par les volontaires. Ils sont indemnisés à hauteur de 40 € net par séance.
Pas donné à tout le monde de se frotter au monde carcéral. Nicolas, qui se définit comme un gars « décontract' dans la vie », n'était pas si fier en entrant, la première fois, « dans cet univers très froid, criblé de barreaux, de lourdes portes en bois hors d'âge. Mais j'étais impatient... »
Pointe d'appréhension tout de même pour celui qui va siéger dans ce « mini-tribunal. Une petite pièce avec juste un bureau et quatre chaises. » Finalement, il gère bien le face-à-face avec les prisonniers.
Cela dure entre 15 et 45 minutes. Le directeur expose les faits, puis le prisonnier est tenu de se justifier, assisté ou non de son avocat. « La tension est plus ou moins forte en fonction du degré de l'infraction, de la personnalité du détenu. » L'assesseur Nicolas Etienne concède qu'il y a « peu d'échanges », mais beaucoup d'écoute.
Enfin, avec la voix consultative de ses assesseurs, c'est le directeur qui prononce, ou non, la sanction disciplinaire. Elle n'aura aucune incidence sur la peine purgée par le détenu.
Elle se traduit par une interdiction temporaire de télévision, de recevoir des colis de l'extérieur, d'accès au parloir, d'effectuer certains achats en cantine, ou une suspension d'une activité culturelle ou sportive... Pour les infractions les plus graves le confinement en cellule disciplinaire (le mitard) peut être prononcé.
Si depuis deux ans la curiosité de Nicolas Etienne s'est un peu érodée, il persiste à passer du costume de boulanger à celui d'assesseur, « tant que cela n'interfère pas trop sur mon métier ». Son planning est tributaire des « bêtises » des prisonniers, mais il reste motivé, « car chaque dossier est différent, et j'apprécie de plus en plus ce contact avec les détenus et les surveillants. » Au point de devenir gardien de prison ? « Non. J'ai trop besoin de ma liberté... »
Ouest-france
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire