jeudi 16 janvier 2014

Affaire Natacha Mougel : le drame aurait-il pu être évité ?

Depuis la mort de Natacha Mougel, la question hante sa famille et tous ses proches : pourquoi Alain Penin a-t-il bénéficié d’une liberté conditionnelle au mois de septembre 2009, un peu avant la moitié de sa peine, alors qu’il était condamné à 10 ans de réclusion pour un premier viol ?
 
 
Qui a fait le choix de la libération d'Alain Penin ? Ce processus inscrit dans la loi doit-il perdurer ? Devait-on le soigner pendant son incarcération et comment ? L'affaire Natacha Mougel a suscité et suscitera encore pendant le procès un débat tendu.

Car la cour d’assises du Nord devra évidemment se pencher sur cette problématique. Le crime pouvait-il être évité ?

Le viol de la première jeune femme a lieu en 2006. Condamné à 10 ans de prison, Alain Penin sort au bout de quatre ans. Une libération conditionnelle qui n’a rien d’exceptionnel : le Code de procédure pénale prévoit que la libération conditionnelle doit être la règle et non pas l’exception.

Alain Penin avait déjà bénéficié de permissions, qui s’étaient bien passées et était parvenu à trouver un emploi au sein des Restos du Cœur, ce qui pouvait être considéré comme un signal très positif par le juge d’application des peines. De plus, l’homme avait un comportement irréprochable en prison.
Mais un détenu, interrogé depuis, lors de l’enquête sur la mort de Natacha Mougel, a expliqué que l’été avant sa sortie, Alain Penin lui avait déclaré qu’il allait repartir à la chasse à sa sortie de prison.
Deux experts, à l’époque, se penchent sur son cas.

La première expertise est défavorable : le psychiatre met en avant des facteurs qui peuvent être qualifiés d’alarmants. Selon lui, le viol de cette première victime, Sylvia, s’inscrit dans « une logique  criminelle froide et organisée », c’est « un sujet manipulateur et indifférent à la souffrance d’autrui ».

La seconde expertise est nettement plus optimiste, et donc en contradiction avec la première. L’expert perçoit des « capacités d’empathie » chez un Alain Penin « qui regrette son geste » et « en comprend difficilement les motivations ». Ce second psychiatre préconise un suivi psychologique « pour discuter de cette situation qui semble avoir été traumatisante pour lui ».
Le risque de récidive est jugé « limité ».

Le juge d’application des peines décide d’accorder une libération conditionnelle  à Alain Penin. Il a pour obligation de rencontrer régulièrement des professionnels de la santé mentale.

"Un risque de récidive faible"

Au cours de ces séances de dialogue, il semble que le comportement d’Alain Penin inquiète les professionnels. Le médecin coordinateur, le 5 novembre 2009, écrit que l’homme a « un discours de façade » et « reste dans une posture de pervers ». Quand la justice lui demande de préciser sa pensée, il revient sur ces écrits et parle alors d’ « un risque de récidive faible ».
Ce médecin a-t-il commis une erreur et empêché la révocation de la liberté conditionnelle ? C’est une des questions qui seront débattues, à n’en pas douter.

Lors de ses auditions devant le juge d’instruction, après le meurtre de Natacha Mougel, Alain Penin admettra qu’il n’a jamais évoqué devant les précédents psychiatres les « pulsions » qui l’animaient depuis son adolescence et qui le poussaient à partir en « chasse ». A-t-il pu tromper les experts ? La question elle aussi est fondamentale.

Quant au problème du traitement des criminels sexuels pendant leur incarcération, il sera lui aussi abordé : que faire de ces prédateurs qui refusent un suivi psychologique ou médicamenteux ? Les criminels sexuels doivent-ils être remis en liberté ? Existe-t-il une solution qui est encore à inventer, comme, par exemple,  une sorte de sas de « décompression » entre la prison et la liberté, un endroit, une surveillance étroite qui permettrait de les observer avant une véritable sortie ?

Le procès d’Alain Penin pose une fois de plus la question de la récidive, un problème de société qui ne peut être abordé sous les feux des projecteurs d’un fait divers épouvantable. Loin des clameurs de la foule, des larmes et des cris, des spécialistes, des juristes, des psychiatres doivent  proposer des solutions et le pouvoir politique s’en emparer pour les mettre en œuvre.

Le risque zéro n’existe pas. Soigner les auteurs de crimes sexuels est une priorité. Selon une experte, le traitement des auteurs permettra forcément de protéger les victimes. Un point de vue que doit admettre la société, même si  la difficulté et la douleur sont immenses.

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