samedi 5 avril 2014

Christiane Taubira refuse le report de sa réforme pénale

La ministre veut étendre la «contrainte pénale» à l'ensemble des délits.
 
Christiane Taubira, ministre de la Justice, vendredi matin, à l'issue du premier Conseil des ministres du gouvernement Valls.
Christiane Taubira, ministre de la Justice, vendredi matin, à l'issue du premier Conseil des ministres du gouvernement Valls.
 
«C'est le premier événement public auquel je participe depuis ma reprise. On m'a fait observer ce matin - lors du Conseil des ministres (NDLR) - que ce n'était pas une bonne idée de venir vous voir.»
 
Une petite phrase prononcée par une Christiane Taubira un rien bravache, mais qui lève un coin du voile sur les relations que la garde des Sceaux, confirmée dans ses fonctions, entretient déjà avec le chef de l'exécutif… Si elle a été reconduite la ministre paraît désormais en résidence surveillée place Vendôme.
 
Mais elle s'est déjà empressée d'enfreindre la consigne pour venir clôturer le colloque organisé par l'Association nationale des juges d'application des peines sur la «surpopulation carcérale». Ironie du sort, elle est intervenue entre deux réunions à la cellule de crise de l'administration pénitentiaire qui gérait vendredi soir une prise d'otage au centre de détention de Montmédy (Meuse).
 
La ministre de la Justice n'aime pas faire profil bas. Celle qui avait tenu tête à Jean-Marc Ayrault pour obtenir le vote de sa réforme pénale au lendemain des municipales admet du bout des lèvres que «l'on peut entendre qu'ouvrir la nouvelle séquence parlementaire avec ce texte n'est pas une bonne idée… Cela ne serait pas lui rendre service.» Mais Christiane Taubira affirme aussi haut et fort qu'«il n'est pas question de repousser le texte sine die. De plus les dates qui jusque-là ont été avancées ne me conviennent pas davantage. Si je peux comprendre que l'on fasse acte de patience et d'attente, la grande sagesse doit se mâtiner d'un peu de folie». Même si elle ne peut pas faire autrement que de reconnaître qu'elle n'a pas la main sur le calendrier. En d'autres mots, Vendôme n'a pas été averti de ce qu'il adviendrait de ce texte emblématique.
 
Sur le fond, la ministre s'est bien gardée de donner trop d'indications nouvelles concernant un texte mal accueilli par l'opinion publique. Elle a cependant confirmé qu'elle souhaitait que la fameuse contrainte pénale, cette mesure permettant de prononcer des sanctions autres que l'incarcération pour les délinquants (obligation de soins, de formation, d'indemnisation des victimes…) soit étendue à l'ensemble des délits et non pas seulement à ceux passibles jusqu'à cinq ans d'emprisonnement - comme cela avait été arbitré par le gouvernement Ayrault… «Si les sursis avec mise à l'épreuve sont concernés, il n'y a aucune raison que ce ne soit pas le cas de la contrainte pénale. Il faut une cohérence», a-t-elle affirmé.

Valse des conseillers place Vendôme

Il ne fait pas bon appartenir à la garde rapprochée de Christiane Taubira. Vingt-deux mois à peine après son arrivée place Vendôme, on compte  déjà en effet de très nombreux  départs dans son équipe…

Mercredi, la directrice de cabinet, Christine Mauguë, a été remerciée ainsi que son directeur adjoint de cabinet, François Pion. Après avoir menti face caméra sur son niveau d'information concernant le dossier des écoutes de Nicolas Sarkozy, Christiane Taubira  a laissé filtrer dans la presse la rumeur d'une bévue de sa directrice de cabinet. Cette dernière aurait «oublié» d'informer sa ministre au sujet  de l'enquête judiciaire concernant l'ex-président de la République et des écoutes en cours… L'affaire s'est avérée finalement si improbable que Christiane Taubira n'a pu faire autrement que d'affirmer sa confiance en sa proche collaboratrice. Mais le remaniement tombe à point nommé pour valider un changement d'équipe qui touche aussi François Pion. Nul doute que ce dernier porte, lui, le poids de l'affaire Falletti,  le procureur général de Paris à qui il fut demandé de démissionner pour divergences politiques. Une faute difficilement compréhensible de la part d'un homme réputé fin juriste et bon politique mais qui en dit long sur la pression qui règne au sein  de ce ministère.

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