mardi 27 mai 2014

Réforme pénale, début d'un débat passionné

La réforme pénale, très chère à la garde des Sceaux Christiane Taubira, passe mardi en Commission des Lois. Les débats dans l'hémicycle débuteront mardi 6 juin. Pourquoi cette réforme est-elle si clivante? Eléments de réponse.   

Ce que défend Taubira

La suppression des peines planchers. C'est un principe fondateur de l'esprit du projet de loi : l'individualisation de la peine. C'est pour cette raison que Christiane Taubira s'oppose aux peines planchers, mesure prise en 2007 par Nicolas Sarkozy, puisqu'elles sont par définitions automatiques. Le projet de loi prévoit que l'examen de mesures d'aménagement des peines soit obligatoire pour les peines de moins de un an de prison (contre deux actuellemen) et en cas de récidive de six mois (contre un an actuellement).
La mise en place d'une contrainte pénale. Christiane Taubira ne considère pas la prison comme la seule et unique solution et part du constat suivant : "La prison porte sa part dans la récidive." Il s'agit de proposer une nouvelle peine, qui ne se substitue pas aux autres peines déjà existantes mais s'ajoute à la "palette" de peines offerte au juge. "Évidemment, et contrairement à ce qui est dit, ce projet de loi ne vise pas à supprimer ni à remplacer la prison. L'échelle des peines est là. Il s'agit d'enrichir l'arsenal répressif qui est mis à la disposition des juges. Concrètement, la contrainte pénale est une peine en milieu ouvert, restrictive de liberté. Elle peut, par exemple, prendre la forme d'un travail d'intérêt général (TIG), d'une obligation de soins ou d'autres obligations imposées par le juge de l'application des peines (JAP). Le projet de loi prévoit qu'elle puisse être prononcée pour tous les délits passibles d'un maximum de cinq ans de prison. Mais le rapporteur PS du texte Domnique Raimbourg a obtenu le feu vert pour élargir la contrainte pénale à tous les auteurs de délits.

La fin des sorties sèches. Pour lutter contre la récidive, Christiane Taubira entend mettre fin aux sorties de prison sans aucun suivi, dite "sorties sèches".  "Les récidivistes plus que les autres doivent sortir avec un contrôle et des contraintes", expliquait-elle en août dernier, à La Rochelle. Depuis le début, la Garde des Sceaux plaide pour "un retour progressif à la liberté" qui pourrait passer par plusieurs obligations pour le condamné, comme c'est le cas par exemple au Canada, attaché à l'accompagnement des condamnés. "La sortie sèche" de prison est le terreau de l'aggravation des récidives", a également déclaré la ministre en rappelant que la nouvelle loi entendait instaurer un rendez-vous judiciaire une fois les deux-tiers de la peine exécutée pour permettre au juge d'application des peines de travailler sur l'avenir du détenu et se prononcer sur une éventuelle libération conditionnelle ou un maintien en prison.

Ce qui est reproché au texte

Le laxisme. C'est le principal angle d'attaque de l'opposition. L'UMP a déposé plus de 300 des 532 amendements qui seront discutés par la commission des Lois. La droite accuse la ministre de vouloir "vider les prisons". "Ça va durer jusqu'à la fin du quinquennat", a soupiré Christiane Taubira, mardi lors de la présentation du texte en Commission des lois de l'Assemblée nationale. Fervent pourfendeur de la réforme pénale, le député UMP Georges Fenech n'a de cesse de dénoncer les "orientations laxistes" du texte. "Le projet vise d'une part à éviter que les délinquants entrent en prison et d'autre part qu'ils en sortent au plus vite. Ce message d'impunité risque d'entraîner une nouvelle hausse de l'insécurité", fait-il valoir sur son blog.

Le manque de moyens. Ceux qui sont favorables au texte sur le fond redoutent un manque de moyens pour mettre en place une telle réforme. C'est notamment le cas de l'Union syndicale de la magistrature – majoritaire – et du Syndicat de la magistrature. L'ancien Garde des Sceaux Robert Badinter a lui-même parlé d'un "bon texte inachevé".  La chancellerie a prévu 1.000 recrutements dans les services pénitentiaires d'insertion et de probation d’ici 2017 (+25%), 59 magistrats dont 40 juges d’application des peines et 40 greffiers (2013-2014). "L'enveloppe ne suffira pas", a toutefois jugé Robert Badinter.

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