L'Etat vient d'être condamné pour conditions de détention «indignes» à la maison d'arrêt d'Agen. Les faits concernent la période 2008 à 2012, et une cellule en particulier. L'État devra ainsi verser 1 500 € de dommages et intérêts à un détenu.
Par jugement devant la cour administrative d'appel de Bordeaux, l'État vient d'être condamné à payer des dommages et intérêts à un détenu de la maison d'arrêt d'Agen en raison de conditions portant atteinte à la «dignité» des personnes.
Suivant les recommandations du rapporteur public ayant examiné l'affaire, le président de la cour, Aymard de Malafosse, a donné raison dans son délibéré à Jean-Pierre L. Le quinquagénaire avait été incarcéré à Agen, de 2008 à 2012.
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L'État devra, lui, verser 1 500 € de dommages et intérêts et autant à son avocat au titre des dépenses pour assurer sa défense, sans oublier 3 200 € de frais au titre du constat d'expert faisant état des conditions de sa détention. Des sommes bien en deçà des demandes faites par Me Frédérique Pujol-Suquet, qui réclamait 21 000 € en réparation du préjudice moral «résultant, selon elle, des conditions inhumaines de détention» de son client.
Ce genre de décision reste rare
L'avocate toulousaine ne manque toutefois pas de savourer cette victoire qui n'est pas une première en France mais qui demeure rare (lire encadré). «Elle l'est d'autant plus qu'après la défection de quatre détenus qui, comme mon client, avaient déposé plainte en 2012, le tribunal administratif de Bordeaux avait rejeté notre requête en décembre 2015», certifie Me Frédérique Pujol-Suquet.
Une juridiction qui avait même poussé le bouchon jusqu'à condamner ce détenu, jugé trop procédurier à l'encontre de l'administration pénitentiaire, à régler lui-même les 3 200 € de l'expert venu constater l'état de vétusté de sa cellule. C'est sur la foi de ce même constat accablant pour la maison d'arrêt lot-et-garonnaise que la cour administrative d'appel a annulé la décision du tribunal administratif de Bordeaux. Il faut dire que ce rapport et les photos qui y sont jointes parlent d'eux-mêmes.
«Cette cellule 109, c'était l'enfer»
Présente avec son patron le ténor toulousain, Me Laurent de Caunes, Frédérique Pujol-Suquet est encore marquée par cette visite. «Lorsqu'on pénètre dans la maison d'arrêt d'Agen, les communs sont magnifiques.
Dans le détail, l'envers du décor est tout autre. J'ai pris une vraie claque», assure l'avocate qui, comme ses confrères, ne connaît des conditions de ses clients que le parloir de la maison d'arrêt. «Dans la cellule de mon client, ils étaient six détenus dans 24 m2, c'est-à-dire 4 m2 chacun! Dès mon entrée, ce qui m'a pris aux tripes, ce sont l'odeur et l'obscurité... On aurait dit une grotte où l'on aurait parqué des animaux. J'en ai pleuré», assure-t-elle.
Et de poursuivre : «Avec pour seule ventilation un vasistas à 2 m de hauteur, obstrué par une grille «anti yo-yo», les détenus doivent systématiquement laisser la lumière allumée. Ajoutez à l'étroitesse des lieux l'absence de portes aux sanitaires, qui se trouvent à proximité des lieux de prise de repas... Il faut imaginer l'odeur à six dans ce lieu sans aération. Une promiscuité de tous les instants. Cette cellule 109, c'était l'enfer et mon client y a passé trois ans et demi...»
Des personnes en détentioon provisoire
Une vétusté générale à laquelle s'ajoutent des installations plomberie et électrique obsolètes, voire dangereuses pour les détenus. Une situation d'autant plus révoltante pour Me Pujol-Suquet que «ces conditions inhumaines de détention ne concernent pas des condamnés mais des personnes en détention provisoire». Si dans cette affaire, l'État n'a pas lancé, pour l'heure, de pourvoi devant le Conseil d'État, l'avocate toulousaine n'en a pas fini avec la maison d'arrêt d'Agen. Une autre procédure est en cours avec un détenu gersois, lui aussi passé par la cellule 109. Jointe sur ce dossier, la direction régionale des services pénitentiaires faisait savoir qu'elle «ne commentait pas les décisions judiciaires».
Les prisons des Baumettes, Varces et Coutances déjà condamnées
Photos de la cellule 109 à la maison d'arrêt d'Agen prise lors du constat de l'expert mandaté par le tribunal administratif de Bordeaux en 2013.
Avant la maison d'arrêt d'Agen, d'autres centres de détentions français ont été dans le collimateur de la justice...
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