vendredi 16 octobre 2015

Les surveillants de prison du Havre ne cachent plus leur ras le bol

Pénitentiaire. Gradés et surveillants de toute la France défileront le 22 octobre à Paris. Un ras-le-bol d’autant plus tangible au Havre que s’y sont multipliées les infractions et agressions.
Les surveillants de prison du Havre ne cachent plus leur ras le bol
 
«Il aura fallu qu’un collègue aille chercher une échelle chez lui. La nôtre n’est même pas aux normes. » Pour peu on serait tenté de chanter « Mais où sont passés les tuyaux » raillant ces gardiens de prison désemparés cherchant une grande échelle.

L’anecdote ne fait pas rire les 182 surveillants et 24 gardiens du centre pénitentiaire de Saint-Aubin-Routot. Elle révèle, à leurs yeux, l’état d’abandon dans lequel se trouve l’institution pénitentiaire bien que le centre succédant à la prison Danton vient à peine de souffler ses cinq bougies.

« N’empêche, rebondissent Nicolas Bihan, délégué régional du SPS, et Steven Sagnier, son secrétaire local, on connaît les mêmes problèmes qu’à Longuenesse (Nord), où, bien qu’annoncée comme une prison modèle, véritable paradis pour surveillants, plus personne ne voulait y travailler. » N’étant pas associés au défilé du 22 octobre, les représentants du SPS ne pourront porter ce message d’alerte.

D’autres, de l’Ufap (Unsa), SNP (FO) ou de la CGT, le feront, marqués par les événements de ces dernières semaines. Une femme rendant visite à son frère, le 10 octobre, assénait plusieurs coups de poing au nez et à la mâchoire d’un surveillant. « Cet acte est plus grave que la prise d’otage d’un agent commise ici en juin 2014. Il faut une sanction rapide », réclame Éléonore Schreiner, déléguée syndicale Ufap.

Les 25 et 30 septembre, deux prisonniers, profitant d’une faille dans la sécurité au moment de quitter l’aire de promenade, se retranchaient sur le toit de l’établissement, réclamant leur transfert. Ils écoperont d’une sanction de 20 jours de quartier disciplinaire. « Depuis, l’établissement a, avec les moyens du bord (ndlr : selon nos informations, une enveloppe de 4 000 € reprise sur le budget d’un autre centre), réparé les concertinas. Sauf qu’avec une simple serviette sous un t-shirt, on doit pouvoir à nouveau passer », note la syndicaliste.

Derrière, le manque toujours plus oppressant de moyens humains dénoncé par les représentants syndicaux. « On est la cinquième roue du carrosse parmi les missions régaliennes. Tous les services sont dépouillés », relance Olivier Duval pour la CGT. En décembre, dix-huit postes de surveillants et neuf de gradés ne devraient pas être pourvus.

Plus de discipline ?

« Dans une prison qui n’a pas été réfléchie pour que le personnel soit en sécurité, c’est grave. » Et le recours occasionnel au mode dégradé (fonctionnement des installations de manière partielle faute de personnel suffisant) de s’imposer afin de minimiser les heures supplémentaires. La cartographie de la Direction interrégionale des services pénitentiaires relevait qu’en 2013, chaque agent réalisait en moyenne, par mois, au Havre, 18 h 06 de temps supplémentaire. Contre 11 h 05 et 6 h 17 pour les maisons d’arrêt d’Evreux et de Rouen.

Au-delà, les surveillants s’interrogent sur leur rôle au quotidien, loin de la représentation qu’en donnent les campagnes de recrutement de l’administration pénitentiaire. « Nous en sommes rendus au rôle de simples porte-clés. On ouvre, on ferme et on prépare la gamelle. Impossible d’assurer notre mission de réinsertion. Le métier est loin d’être enrichissant. Le taux de démission est énorme », regrettent-ils.

Difficile alors de reprendre en mains des détenus face auxquels, selon les surveillants, l’autorité n’est plus la norme. « La peine privative de liberté a perdu son sens. S’il n’est pas question de remettre en cause les conditions de détention il est grand temps de revenir en arrière en matière de discipline.

 C’est le monde à l’envers...

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