Pour la première fois, un dispositif de vote anticipé par correspondance va être expérimenté, du 18 au 22 mai, dans tous les établissements pénitentiaires de France.
"Pour les prochaines élections européennes, je veux que tous les détenus en France puissent exercer le droit de vote."
En mars 2018, Emmanuel Macron avait annoncé vouloir "simplifier" l'accès aux urnes pour les prisonniers. Plus d'un an après, à quelques semaines du scrutin européen, le ministère de la Justice a précisé, vendredi 26 avril, le nouveau dispositif bientôt expérimenté. On vous explique.
Les détenus ont-ils le droit de vote ?
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Contrairement à une idée répandue, les personnes condamnées ne sont pas automatiquement privées de la possibilité de voter. Seule une minorité d'entre elles ont vu leur peine assortie d'une privation temporaire des droits politiques. Les conditions étaient plus strictes par le passé, comme le rappelle le site Vie publique : "Jusqu’en 1994, le Code électoral prévoyait, pour certains délits et pour l’ensemble des crimes, que les personnes condamnées étaient automatiquement privées de leur droit de vote de façon permanente".
Pour le reste, les critères restent les mêmes qu'à l'extérieur : pour voter aux élections du 26 mai, il faudra être ressortissant européen, majeur et inscrit sur les listes électorales.
C'est la première fois ?
Non. Jusque-là, comme le détaille le site du ministère de la Justice, il était possible de voter par procuration ou de demander une permission de sortir pour se rendre dans son bureau de vote. Dans les faits, c'était "très compliqué", de l'aveu même de la ministre de la Justice, Nicole Belloubet.
"Si vous êtes détenu à Fresnes ou à Fleury, vous ne connaissez personne dans ces villes qui va aller voter pour vous", explique au JDD le délégué général de l'association Robin des lois, François Korber, lui-même ancien détenu. En 2017, les taux de participation à la présidentielle et aux législatives en détention ont ainsi été compris entre 3 et 5%. Seules 853 procurations ont été signées et 200 permissions accordées pour élire le chef de l'Etat, selon un amendement du gouvernement au projet de réforme de la justice.
Comment va s'organiser le scrutin ?
Pour la première fois, les bulletins vont franchir les portes des prisons, avec un système de vote anticipé par correspondance (jusque-là réservé aux Français de l'étranger lors des législatives). Sur un total de 56 070 détenus (hors mineurs, étrangers et condamnés expressément déchus de leurs droits civiques) répondant aux critères de vote, près de 10% se sont inscrits pour en bénéficier, soit 5 342 personnes, selon le ministère de la Justice, cité par le HuffPost. Parmi eux, "une grande majorité de primo-votants".
"Nous avons fait face à une vraie poussée citoyenne, c'est beaucoup plus que ce que nous avions anticipé."
L'administration pénitentiaire
au HuffPost
Le vote aura lieu, selon les établissements, entre le 18 et le 22 mai. Après avoir reçu le matériel électoral, les détenus seront conduits dans une pièce, où ils seront seuls pour glisser leur bulletin dans l'enveloppe. "Il ne s'agira pas nécessairement d'un isoloir en tant que tel, précise le ministère de la Justice à Libération. L'idée est de permettre au détenu d’exprimer son suffrage en étant soustrait à la pression éventuelle d'autres personnes détenues."
Pas d'urne non plus, mais une remise au greffe de l'établissement pénitentiaire, qui glissera l'enveloppe dans un deuxième pli, contre signature. Les bulletins des 188 prisons seront acheminés à Paris et dépouillés le jour officiel du scrutin, le 26 mai, par une commission électorale spécialement désignée.
Ce dispositif va-t-il être reconduit ?
Pas sûr. L'article 87 de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, dont découle ce dispositif, ne porte que sur "l'élection des représentants au Parlement européen". Le ministère de la Justice explique à Libération qu'une telle organisation "serait difficile à mettre en œuvre pour des élections locales, a fortiori avec un entre-deux-tours limité à une semaine", comme ce sera le cas aux municipales de 2020. Un "dispositif pérenne" est en cours d'étude.
L'administration pénitentiaire se montre optimiste pour 2022, année de présidentielle et de législatives, où elle est "persuadée" d'atteindre un nombre de votants "encore plus important" qu'aux européennes. D'ici là, l'association Robin des lois espère obtenir une avancée supplémentaire : l'installation de véritables bureaux de vote en prison, avec un isoloir, une urne et un décompte sur place.
Franceinfo
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