À Quimper, la justice est fortement impactée par le nouveau fonctionnement des extractions judiciaires. Le procureur de la République se dit inquiet pour le bon fonctionnement des institutions.
Une semaine après la mise en place de la nouvelle organisation des extractions judiciaires (Le Télégramme du 29 avril), les agents de l'administration pénitentiaire ont commencé à remplacer gendarmes et policiers pour le transfert de détenus entre les maisons d'arrêt et les tribunaux.
Une première semaine qui confirme les inquiétudes des magistrats. À Quimper, sur les 37 réquisitions formulées auprès de l'Autorité de régulation et de programmation des extractions judiciaires, 15 ont fait l'objet d'un refus d'extraction, faute de moyens.
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L'extraction d'accusés, pour la prochaine session d'assises qui s'ouvrira dans quinze jours pose également problème pour une journée. Le tribunal de grande instance n'a obtenu que huit accords, les 14 dossiers restant étant en attente de réponse. Une situation qui conduit Thierry Lescouarc'h, le procureur de la République de Quimper, à évoquer son inquiétude « pour le bon fonctionnement de nos institutions ».
« Une situation grave »
Pour pallier cette situation, les juridictions font, dans la mesure du possible, appel à la visioconférence. Mais se heurtent là encore à des difficultés techniques et surtout à l'impératif de l'accord de toutes les parties.
« Cela pose la question de l'accès au juge, un droit fondamental », rappelle le procureur de la République. Une situation qui pourrait conduire à la remise en liberté de détenus qui ne seraient pas présentés devant le juge des libertés et de la détention dans les délais prévus par la loi. « Nous sommes face à une situation grave dont tout le monde a conscience », poursuit le magistrat. La dernière possibilité, faute d'extraction par les services pénitentiaires et de visioconférence, est la réquisition des forces de l'ordre. Les gendarmes, pour Quimper. Hier, un détenu qualifié de « dangereux » a ainsi été extrait par les gendarmes pour comparaître devant le juge d'application des peines.
Appel du pied aux gendarmes
Pour les autres situations, le colonel Richard Pégourié, commandant du groupement du Finistère, évoque une gestion au cas par cas mais se veut ferme : « Ce n'est plus à la gendarmerie d'assurer cette mission », rappelle-t-il, évoquant les effectifs rendus par les gendarmes dans le cadre du transfert de compétence. Une situation dont le procureur se dit conscient : « Je préfère les forces de l'ordre employées à interpeller les malfaiteurs mais nous sommes face à un casse-tête ». Un nouveau bilan sera dressé à la fin du mois.
EN COMPLÉMENT
Visioconférence. De l'indépendance du juge
Il devait être jugé en comparution immédiate aujourd'hui à Brest pour des violences commises contre sa femme. La deuxième fois qu'il vient : la première, il avait demandé le fameux délai pour mieux préparer sa défense. En attendant, il avait été embastillé. C'était avant le micmac du transfert des détenus vers les prétoires. Depuis, tout a changé.
Renvoi instantané
C'est donc d'une pièce de la maison d'arrêt de Brest que son procès devait se tenir, parce que d'escorte, il n'y a pas. Lui, face à une caméra et dans la salle d'audience, un plan américain de lui, assis dans une salle très impersonnelle et fouillant dans quelques notes, sur écran plasma. Mais le président Jublin a coupé court, tout de suite. « Je n'ai pas envie de vous juger de cette manière, je veux que vous soyez avec nous pour répondre de vos gestes ». La loi impose toutefois au président de laisser la parole aux parties. Parquet, défense et même partie civile protestent assez mollement que le procès du violent peut bien se tenir aujourd'hui. Pour tout un tas de raisons : détention provisoire prolongée pour les uns, dossier « en état » pour les autres ou encore envie d'en terminer avec cette affaire... Mais le président Jublin et ses deux assesseurs ont leur religion faite depuis leur entrée dans la salle d'audience. On ne juge pas un homme qui a déjà peiné à entendre et reconnaître son identité lors d'une simple lecture du juge. On ne le juge pas comme ça. Le procès est renvoyé sans autre forme au 31 mai, « en espérant que vous puissiez être extrait, sinon on verra ce jour-là », a déjà prévenu le magistrat.
Pour un procès juste
Lequel ne veut plus de cette alternative de visioconférence...
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