Martine Marié est à la tête du centre pénitentiaire Lille-Loos-Sequedin depuis décembre. Elle ne dirige donc pas seulement la maison d’arrêt, mais aussi le quartier de semi-liberté d’Haubourdin, deux unités hospitalières, au CHR de Lille et à Seclin. Interview.
« Mes missions sont la gestion du budget, et beaucoup de management. Vis à vis des détenus, je dois mettre en œuvre les orientations nationales et régionales, comme la prévention de la récidive. En fait, cela ressemble à une entreprise. On cherche à atteindre des objectifs, sans la notion de profit , mais avec la bonne gestion des deniers publics (défense de rigoler). Une prison est comme une micro-société. »
– Depuis votre arrivée en décembre, qu’avez-vous changé ?
« Je suis dans un temps d’observation (donc rien ! ) . Je peux vous dire que tout est différent d’une prison à l’autre. L’architecture impacte tout, notamment la prise en charge des personnes détenues. En prison, chaque mouvement compte. S’il y a une grande salle d’activités, un grand gymnase. Si les coursives sont ouvertes ou pas : les surveillants peuvent-ils se voir d’un étage à l’autre ? À Sequedin non, mais les nouveaux établissements y reviennent, afin que les agents se sentent moins isolés. Avant, les cours de promenade étaient plus petites, on les appelait cours camembert. » (hum...)
– Des actions culturelles ont lieu régulièrement à Sequedin, comme des concerts de l’Orchestre national de Lille. Vous allez continuer ?
« On est gouvernés par l’ouverture de la prison. Avoir les mêmes dispositifs qu’à l’extérieur, pour favoriser l’insertion. Cela participe aussi à la prévention de la récidive : une personne à qui on peut donner des cadres se réinsérera mieux. La sortie se prépare dès l’arrivée du détenu. Même si, en maison d’arrêt, le temps de détention est relativement court. »
– Les détenus peuvent travailler. Comment cela se passe-t-il ?
« Ils sont vus par l’équipe travail et formation professionnelle. Puis ils peuvent travailler au service général, ou pour un prestataire privé. Dans le premier cas, ils s’occupent des cantines, du nettoyage, ou de la buanderie. La restauration est le gros poste de travail. Il y a aussi des détenus coiffeurs, et des bibliothécaires, un par détention. Sinon, ils sont dans des ateliers de conditionnement. »
– Les enfants pourront toujours voir leurs parents détenus pour Noël ?
« Notre volonté est de développer la parentalité. On continuera à travailler sur Noël, mais aussi sur les fêtes des pères et des mères. Et, c’est une spécificité de Sequedin, nous avons une nursery dans le quartier femmes, avec cinq places. Les femmes peuvent garder leur bébé pendant 18 mois. Elles ont des cellules aménagées avec des lits pour bébés, et peuvent sortir dans un jardinet. »
– Qu’est-ce qui vous plaît dans le fait de travailler dans un univers carcéral ?
« Ce n’est pas tellement l’univers qui me plaît. C’est la richesse de ce que l’on fait, les rencontres, la construction de projets et leur réalisation. Réussir à construire quelque chose qui fasse avancer l’établissement, tout en respectant les principes de sécurité. Ici, c’est une concentration. Dans la société extérieure, les choses sont diluées. Le tout est de trouver un équilibre. »
Les sujets qui fâchent
Martine Marié, directrice du centre pénitentiaire, est à peine arrivée que les organisations syndicales s’enflamment à coups de tracts. Avec, souvent, les mêmes revendications qu’au lendemain de l’explosive évasion de Redoine Faïd, le 13 avril 2013.La surpopulation. La maison d’arrêt compte 840 détenus pour 584 places. « Bien sûr, on est tributaires des écrous. Il n’y a pas de numerus clausus, explique la directrice. Mais, aujourd’hui, il n’y a plus de matelas au sol. » C’est à dire de cellules de trois. Il s’agit de gérer la population pénale, en envoyant les prisonniers condamnés (qui n’ont rien à faire en maison d’arrêt, réservées aux prévenus ou aux courtes peines) en centre de détention.
Les projections. Les surveillants se sont plaints, dans des tracts, de la multiplication des projections de colis, pleins de drogue ou de portables, par-dessus l’enceinte. « Ils se garent en warning sur le bord de la RN 41, ou sur le pont de l’A25, puis ils passent par le trou du grillage et lancent. » Martine Marié répond : « Le grillage est réparé, mais il est régulièrement ouvert. Le cadre d’intervention est difficile. » Les agents pénitentiaires n’ont pas la compétence d’interpeller les lanceurs, ils doivent appeler la police.
La sécurisation. Après l’évasion de Redoine Faïd, un plan de sécurisation avait été évoqué par la ministre de la Justice. Un portique à ondes millimétriques, qui coûte 150 000 €, devait être posé. « Aucune nouvelle », dit la directrice. Les parloirs, où avait débuté la belle, abîmés par l’explosif, ont en revanche été reconstruits...
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