mardi 4 octobre 2016

Surpopulation carcérale : du « tout carcéral » au « milieu ouvert »

Feux de palettes, pneus brûlés et filtrage des entrées : les prisons françaises étaient la semaine dernière le théâtre de blocages par les personnels pénitentiaires. 

Surpopulation carcérale : du « tout carcéral » au « milieu ouvert »

Fresnes, Osny (Val-d’Oise), Fleury-Mérogis (Essonne), mais aussi Grasse (Alpes-Maritimes) ou Annœullin (Nord), les personnels pénitentiaires de toutes les régions de France ont tenu à dénoncer des conditions de travail toujours plus dégradées.



« Depuis plusieurs semaines, les agressions, les prises d’otages, les mutineries se multiplient. En face, on a une administration pénitentiaire et des politiques qui restent sourds. Au vu de l’accélération des événements, on a décidé de lancer dans l’urgence ce mouvement », expliquait ainsi Emmanuel Baudin, secrétaire interrégional FO pénitentiaire du Grand Ouest, présentant les blocages de jeudi comme « une première étape ».

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Au 1er août dernier, on recensait 2 500 agressions contre 4 000 pour toute l’année précédente. Mutineries et surtout attaques à l’arme blanche se sont multipliées dans les établissements, reflets d’un malaise et d’un déséquilibre marqué dans les prisons françaises.

Un plan contre la surpopulation carcérale

Côté détenus, les prisons françaises en comptaient 69 375 en juillet dernier pour une capacité de 58 311 places, triste record depuis avril 2014. Cette surpopulation carcérale, en hausse depuis plusieurs mois, est aussi attribuée à la lutte antiterroriste instaurée en France.

Selon Adeline Hazan, juge d’application des peines, nommée depuis 2014 contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, « le contexte sécuritaire des dix-huit derniers mois, marqués par les attentats qui ont frappé le pays, imprègne la mentalité des magistrats qui font preuve de frilosité et n’osent pas prendre des décisions d’aménagement de peine ».

Côté gouvernement, dès le 20 septembre dernier, le Garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas présentait son plan de lutte contre la surpopulation carcérale, privilégiant l’encellulement individuel, principe inscrit dans la loi depuis 1875 mais jamais appliqué.

À ce jour, seuls 26 829 détenus disposaient d’une cellule individuelle alors que plus de 1 500 autres dormaient sur des matelas posés au sol. Un détenu par cellule pour 80 % de la population carcérale d’ici à 2025, tel est l’ambitieux projet proposé qui nécessitera donc de construire, « en tenant compte des programmes immobiliers en cours, entre 10 309 cellules (dont près de 800 doubles) et 16 143 cellules (dont près de 1 500 doubles) ». Il ajoute qu’« il est indispensable de maintenir des cellules collectives pour les détenus qui le souhaitent ou en raison d’autres nécessités » – comme par exemple la prévention du suicide.

Alternatives carcérales

Face à cette annonce, nombreuses ont été les réactions d’opposition au « tout carcéral ». C’est le cas de l’Observatoire International des Prisons (OIP) dont le responsable du pôle contentieux fait l’analyse suivante : « Ce qui est frappant, c’est qu’il n’y a aucune analyse des causes de la surpopulation. Depuis les 25 dernières années, 30 000 places de prison ont été créées et malgré cela nous sommes toujours face à une surpopulation… Rien n’a été dit sur les peines alternatives à l’incarcération ».

« 30 000 places de prison ont été créées et malgré cela nous sommes toujours face à une surpopulation. »
-Observatoire International des Prisons

En France, les peines dites de « substitution » ou de « remplacement » concernent avant tout le « milieu ouvert ». Le placement sous surveillance électronique évite, depuis 1997, la détention en établissement pénitentiaire. C’est le cas des courtes peines qui sont d’ailleurs à l’origine de 80 % des condamnations de détenus se retrouvant en maisons d’arrêt.

La « contrainte pénale  », promulguée en 2014 mais encore très peu prononcée par les magistrats, soumet le condamné à des obligations et des interdictions si sa peine d’emprisonnement n’excède pas cinq ans. D’autres alternatives sont aussi suggérées telles que le recours plus généralisé aux amendes et aux Travaux d’Intérêt Général (TIG) pour certaines infractions (dégradations de biens publiques…), l’objectif étant d’éviter l’incarcération pour des délits mineurs.

En 2014, sur l’ensemble des condamnations prononcées en matière de délits, 11,3 % seulement étaient des peines alternatives, 50,8 % des peines de prison et 32,8 % des amendes.

Epoch Times

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