Souvent décrié, le milieu carcéral se bonifie parfois avec le temps, comme à Châlons où l’on gère l’établissement comme une entreprise autonome.
"La maison d’arrêt porte bien son nom, écrivait en 2010 Pierre Lemaître, le tout nouveau prix Goncourt. Ici, hormis les trafics en tout genre, toute la vie s’arrête, ou à peu près. » À peu près, en effet, car derrière les hauts murs d’enceinte de la maison d’arrêt de Châlons-en-Champagne, vieille de près de 160 ans, la vie continue bel et bien. Ici, une microsociété s’active même sans relâche.
Comme dans toute entreprise ordinaire, des dizaines de salariés s’emploient quotidiennement à son fonctionnement. Ressources humaines, comptabilité, gestion des effectifs, services techniques, service courriers auxquels s’ajoutent, entre autres, des services spécifiques comme le greffe, ils sont ainsi 125 personnels à œuvrer dans ce petit monde autonome où la recherche de l’équilibre entre détenus et agents de l’administration pénitentiaire constitue un leitmotiv permanent.
Réformes et travaux de réhabilitation
Il y a quelques années en arrière, le constat n’était cependant pas aussi positif. Mais désormais, des contrôles d’hygiène sont effectués régulièrement, les repas sont élaborés selon une trame alimentaire, les cellules disposent de toilettes closes, remises aux normes dans le quartier disciplinaire pour une plus grande sécurité et, depuis deux ans, l’eau coulant des robinets est chaude. Le résultat de nombreux travaux de réhabilitation réalisés ces dernières années et qui se poursuivent encore aujourd’hui sous l’impulsion de la directrice de l’établissement, E. Jullien. Des réformes ont dû également être absorbées comme la réécriture des chartes de service et la labellisation du quartier des arrivants où sont placés les nouveaux détenus en attendant leur affectation de cellule. « Nous sommes attentifs au respect des individus » commente à ce propos le chef de détention.De nombreux efforts ont aussi été consentis pour offrir aux détenus de nombreuses activités afin de les écarter de tout comportement oisif. Des ateliers leur sont accessibles, des formations professionnelles délivrées par des organismes indépendants, des cursus scolaires dispensés par des personnels de l’Éducation nationale, de même que divers ateliers, ouverts aux hommes et aux femmes, ainsi que des activités sportives et une bibliothèque plutôt bien tenue. On peut en outre travailler à raison de 4,50 euros de l’heure, en fonction du rendement, dans des conditions contrôlées périodiquement par l’Inspection du travail. Également exercer son culte religieux, entreprendre des démarches de réinsertion et bénéficier de soins ou de suivis médicaux. La maison d’arrêt de Châlons compte en effet dans ses murs des médecins, gastro-entérologues, radiologues, dentistes, psychiatres, psychologues ou encore des gynécologues.
Priorité à la polyvalence
Dans un contexte social où les effectifs en partance ne sont pas toujours remplacés, une telle évolution n’est toutefois pas exsangue de contraintes. Il a fallu s’adapter et compter sur toutes les bonnes volontés. « Il y a beaucoup de chevilles ouvrières dans cet établissement, souligne sa directrice. Beaucoup de métiers y sont exercés. Un petit établissement comme celui-ci est riche en expériences car nous sommes amenés à tout faire. Nous décuplons les polyvalences et menons nos missions 24 heures sur 24 à flux tendus. Chacun a sa place, mais tout le monde travaille dans un but commun. »Il n’en demeure pas moins que l’équilibre demeure fragile. La gestion d’une maison d’arrêt est complexe et les contraintes nombreuses, en particulier quant à l’affectation des détenus en cellule. Mais à Châlons, l’humain n’est pas mis au rebut. Au contraire, il constitue la toile de fond d’un quotidien par trop souvent méconnu.
L'Union
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