mercredi 13 avril 2016

Vienne - La 35 e punition n'apportera rien à " l'enfant sauvage "

Quelle réponse pénale pour le réfractaire aux condamnations ? Les juges ont choisi la prison quand le procureur - chose rare - voulait une “ peine utile. ”

Le centre pénitentiaire de Poitiers Vivonne. David en sortait juste. Il y est retourné. A 32 ans, il aura quasiment passé autant de temps derrière les barreaux qu'à l'extérieur. - Le centre pénitentiaire de Poitiers Vivonne. David en sortait juste. Il y est retourné. A 32 ans, il aura quasiment passé autant de temps derrière les barreaux qu'à l'extérieur.

Plus d'une condamnation par an depuis sa naissance. Pour les juges du tribunal correctionnel de Poitiers, David, 32 ans et 34 condamnations, donc, inscrites au casier judiciaire, force le respect.
 
Il était jugé pour la 35e fois sous le mode de la comparution immédiate lundi : vol d'une voiture et conduite sans permis et sans assurance en récidive, de l'alcool et des stupéfiants dans les veines… Il était sorti de prison quatre jours avant. Juges et procureur accusent le coup.

" J'ai un pincement au cœur quand je vois ce garçon "

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« Comment expliquez-vous un tel casier… c'est hallucinant, s'étrangle le président. Il y a quinze pages que je ne vais pas lire. » David marmonne quelques mots incompréhensibles.

Sa chance, sa voix, c'est son avocate, Me Yasmina Djoudi. Elle seule peut mettre des mots sur une existence délitée, dynamitée par la misère humaine dans la communauté dite « des gens du voyage. ».

« J'ai un pincement au cœur quand je vois ce garçon, j'ai de la peine. Il n'est jamais allé à l'école et il a grandi au milieu des détritus. Au premier sens du terme puisque son campement était situé dans une déchetterie au départ. Ses parents étaient inexistants. Il a grandi au milieu de rien et de tout. C'est un enfant sauvage. Il n'a pas vu ses enfants depuis huit mois à cause de la prison. Il faut qu'il soit reconnu comme adulte handicapé… »

L'explication psychiatrique pour expliquer un tel acharnement à aimer se faire punir, le procureur y croit dur comme fer. Problème : les experts psychiatres sont en grève depuis quatre mois. Mais le ministère public persiste et signe. « Il faut une peine utile. » Sa réquisition, extrêmement clémente pour un récidiviste, étonne les observateurs : six mois de prison avec sursis, mise à l'épreuve pendant deux ans avec obligation de se former et de travailler.

Les juges n'ont pas été sensibles à l'approche sociale du procureur. Ils ont eu la main lourde : 18 mois d'emprisonnement, dont dix mois avec sursis, mise à l'épreuve pendant deux ans et mandat de dépôt. David est reparti au centre pénitentiaire de Poitiers Vivonne comme il était venu : menotté, entre trois policiers. Huit mois de prison à purger.

La Nouvelle République

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