Nous sommes retournés hier à l'Enap, dont on a beaucoup (trop) parlé cette semaine dans les médias, à cause de la vidéo compromettant une élève en stage avec un détenu de Lille.
A Agen, on fait le dos rond.
Le roseau plie mais ne rompt pas : cette vérité de La Fontaine illustre l'état d'esprit prévalant actuellement au sein de l'administration pénitentiaire.
Après l'évasion spectaculaire de Rédoine Faïd, la «sextape» d'une jeune stagiaire de l'Enap (filmée dans une position compromettante avec un détenu, à la prison de Lille-Sequedin) est un nouveau coup dur. Et pourtant : à la pénitentiaire ont fait bloc, et l'on attend le calme après la tempête.
Connotation sexuelle
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Hier, se déroulaient deux baptêmes de promotions (lire ci-dessous) et évidemment les bouches étaient cousues. Hors de question de commenter cette affaire de vidéo controversée, primo pour ne pas faire de pub au détenu qui a piégé la jeune élève surveillante, secundo pour protéger cette dernière et sa famille.
Hélas, beaucoup aura filtré sur cette jeune femme d'une vingtaine d'années, dotée d'un bon bagage scolaire (bac + 3) et qui avait intégré la 196e promotion de l'Enap en janvier dernier.
Comme tous les élèves de sa promotion, elle avait fait un stage découverte en milieu carcéral en février, avant une plus longue immersion professionnelle dont tout ou partie a été réalisée à Lille-Sequedin.
On sait également qu'outre la vidéo à connotation sexuelle, des images types selfies circulent sur Internet de la jeune élève surveillante avec les détenus de la fameuse cellule…
A l'Enap donc, c'est le silence radio le plus absolu. Consignes de Paris. Il s'agit également d'épargner, ou du moins de ne pas «tirer sur l'ambulance». On sait toutefois que la directrice Sophie Bleuet a immédiatement écarté cette élève de la scolarité et que – en toute logique – elle ne portera jamais l'uniforme de la pénitentiaire.
Approchées, les sources syndicales sont également très irritées par cette déferlante médiatique, qui ternit l'image de l'administration alors que tant reste à faire en termes de moyens humains (le manque de personnel est une revendication récurrente) et matériels.
Cette vidéo jette le trouble, sinon l'opprobre, alors que le mal-être est profond en interne, et que la tension – voire la violence physique – reste vive dans les coursives carcérales.
«99 % de nos élèves n'ont rien à se reprocher»
«Se mettre dans une telle position face à un détenu, c'est impensable», lâchait-on hier à mots couverts à l'Enap. Un autre fonctionnaire de rester philosophe : «Cette jeune n'est pas faite pour ce métier, voilà tout, passons maintenant à autre chose. Car 99 % de nos élèves n'ont rien à se reprocher. Et puis les stages servent justement à détecter les comportements mauvais».
Le roseau plie donc, mais ne rompt. Il ne le peut pas : la machine Enap doit en effet tourner à plein régime, et former à tour de bras. Une formation qui s'accélère et se densifie. A la rentrée prochaine, le cursus tombera en effet de 8 à 6 mois. Et le nombre d'inscrits donne le vertige : les 197e promotion (début septembre) et 198e (début octobre) compteront chacune 946 élèves surveillants. Du jamais vu.
Deux baptêmes de promotions hier
L'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire (Enap) ne reçoit pas que des élèves surveillants. Elle forme des officiers, des directeurs de prison, mais aussi des moniteurs de sport ou encore des conseillers pénitentiaires d'insertion et probation (CPIP, dont la mission avait beaucoup intéressé le président Macron lors de sa visite de l'école agenaise, en mars).
Hier, ces deux catégories d'agents étaient à l'honneur. On aura ainsi célébré la fin de formation de la 21e promotion de CPIP «promotion Simone Veil». Forte de 239 élèves, elle rend par son nom hommage à l'ancienne haut fonctionnaire de l'administration pénitentiaire au ministère de la Justice, qui est entré récemment au Panthéon avec son époux.
L'un des fils de Simone Veil devait se déplacer à l'Enap pour honorer ce baptême de sa présence. N'ayant pu réaliser le voyage, il a toutefois transmis un message aux élèves. Dans leur adresse à la directrice Sophie Bleuet, les élèves ont souligné ceci : «Nous pensons tout particulièrement aux fonctions que Simone Veil a exercées avec passion au sein de la direction de l'administration pénitentiaire de 1957 à 1964, avec pour mission de contrôler les établissements pénitentiaires. Elle y a constaté, avec stupeur, une indigence qu'elle jugeait incompatible avec les valeurs fondamentales de notre pays. Sa conviction était acquise, (citation) : «Les prisons doivent servir à élever intellectuellement les détenus, et pas seulement à les punir».
Honneur aussi aux 12 moniteurs de sport de la 33e «promotion Stéphane Roy». Ce dernier était un agent pénitentiaire, très lié à la Nouvelle-Calédonie, et sportif de grande valeur...
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