lundi 16 décembre 2013

Argentan - Cinq questions à : Patrice Gandais (UFAP-UNSa-Justice)

Après la mutinerie au centre de détention d'Argentan
 
- Les syndicats ont rencontré lundi, à Argentan, Yves Lechevallier, directeur interrégional de l’administration pénitentiaire. Il connaît bien ce centre de détention pour l’avoir dirigé de 1996 à 1999. Que ressort-il de cette entrevue ?

- C’était une visite assez générale. Il a annoncé qu’Argentan serait en quelque sorte un site expérimental pour une mise en sécurisation des personnels. Il a fait remettre à nos élus des documents qu’ils doivent étudier pour avoir une réflexion. Il les reverra le 18 décembre pour faire le point de ce qui peut être fait en priorité.

 Le métier de surveillant est soumis à rude épreuve ?

- On a une population pénale de plus en plus vindicative. On nous donne de moins en moins de moyens pour assurer une sécurité à l’intérieur et les détenus font un peu ce qu’ils veulent. C’est devenu du n’importe quoi. Les enfermer pour les laisser continuer à se droguer à leur bon vouloir, pour la paix sociale, si c’est ça la punition et qu’on n’occupe pas ce temps à guérir des addictions quelconques, la prison, il est grand temps de se poser la question : à quoi elle sert, si ce n’est qu’à endetter le contribuable ?

 Effectivement, quel regard portez-vous sur la prison ?

« On fait tout pour que le détenu soit bien. Pour que la contrainte pénitentiaire ne soit plus pénible que ça car on a
on a des lobbyistes, l’observatoire international des prisons, toutes les associations qui luttent pour les droits de l’homme… Tous ces lobbyistes là interfèrent sur la politique pénitentiaire et nos législateurs suivent comme des grands benêts. Oui, les détenus sont des pauvres malheureux !

Mais on n’a pas demandé à ce qu’ils soient là. S’ils y sont, c’est parce qu’ils ont de bonnes raisons d’y être, pour la plupart. Même s’il y en a qui crient à l’innocence. Ils ont commis des crimes, des délits, des meurtres et donc, ils sont punis. Pourtant, on ne peut pas les forcer à travailler. Ce qui fait que s’ils ne travaillent pas, ils n’ont pas d’argent, et ne peuvent pas payer les dommages et intérêts aux victimes, auxquels ils ont été condamnés. Quand un surveillant est agressé, l’État, à travers un fond, nous verse ces indemnités. On signe un papier dans lequel on s’engage à ne rien toucher du détenu.

On ne peut pas davantage obliger un jeune qui est déscolarisé à aller à l’école. Donc, à longueur de journée, ils continuent, pour la plupart, à traficoter le chichon, ça joue à la Playstation, ça fout par les fenêtres la nourriture qu’on leur donne et ça se prépare de la bouffe. C’est affolant la prison !  »

- Cette mutinerie aurait pu avoir des conséquences plus graves ? Peut-être à cause d’un portable trouvé lors de la fouille. D’autre part, d’après certaines sources, les détenus auraient fait en sorte, depuis l’intérieur, de médiatiser leur action ?

- Ce n’est pas la première fois car, sur d’autres établissements, il y a eu des vidéos qui ont été tournées et qui ont été diffusées sur internet. En fin de compte, ils font ce qu’ils veulent. On ne s’inquiète plus de rien !

 - On peut donc facilement introduire un portable en prison ?

- On a beau rabâcher les mêmes choses sans arrêt. L’incident qui a eu lieu, on l’avait prédit. L’administration avait été alertée du trafic de portables. Il y a eu cette fouille qui a été faite, effectivement, après des mois d’insistance auprès de la direction. Alors, si on demande une fouille complète de l’établissement, ils vont peut-être tout saccager !

Mais ce n’est plus possible, car, à partir de janvier, on va nous supprimer les fouilles corporelles de détenus sur Argentan. Les gens qui viendront au parloir auront un contact avec l’extérieur. Nous, nous n’aurons plus aucun moyen de contrôle. Si ce n’est qu’on doit nous installer un portique de détection métallique à la sortie du parloir.

Sauf que, j’ai fait la démonstration, à plusieurs reprises devant des directeurs, il y a aujourd’hui des portables qui passent sous le portique sans sonner. Et au-delà des portables, il y a des armes aussi, en résine, qui peuvent rentrer en pièces détachées, sans sonner.
 

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