Le « record » du nombre de détenus a été battu.
Un document de l’administration pénitentiaire intitulé « Statistique mensuelle de la population écrouée et détenue en France » révèle ainsi qu’au 1er avril 2014, 68 859 personnes étaient détenues (pour 80 740 personnes écrouées), soit 90 de plus que lors du précédent sommet de janvier 2013.
En tout cas, même s’il existe une politique pénale, les peines de prison sont décidées par des magistrats indépendants. Pourtant, tout a été fait pour réduire le nombre de détenus ; dans l’ordre chronologique inverse : circulaire du Garde des Sceaux visant à ne plus requérir de peines plancher avant leur suppression à terme, introduction imminente de la contrainte pénale, multiplication des peines alternatives, impossibilité d’un mandat de dépôt à l’audience pour les peines inférieures à deux ans alors que la même majorité – la précédente – avait adopté les peines planchers (comprenne qui pourra).
Le lecteur cartésien sera étonné d’apprendre qu’il existe des prisonniers … non détenus, c’est-à-dire, selon un terme officiel que Conrad Hilton n’aurait pas renié, des détenus « non hébergés » (sic). Cela explique la différence entre le nombre d’écrous et de détenus. Il s’agit de personnes bénéficiant de mesures d’aménagement (semi-liberté, bracelet électronique) … rien à voir avec les quelque 100 000 peines définitives non mises à exécution.
Un calcul aisé permettra de constater qu’il y a chez nous un détenu pour environ 950 habitants, soit bien moins que la moyenne européenne de 1 pour 670, et sans mesure avec le ratio américain d’environ 1 % (mais loin devant l’Inde et ses 33 détenus pour 1 000 habitants : l’Indouisme adoucit les moeurs).
Il n’y a jamais eu proportionnellement aussi peu de détenus non condamnés (17 846), ce qui ne s’explique pas par un recul de la détention provisoire, mais par une augmentation du nombre de condamnés par des mécanismes plus répressifs (comparutions immédiates, déferrement systématique pour certaines infractions, peines planchers). Seuls 1 % des détenus sont mineurs alors que ceux-ci sont impliqués dans 6 % des faits de délinquance. L’esprit « humaniste » de l’ordonnance de 1945 a donc de beaux restes.
La France se situe enfin parmi les mauvais élèves européens pour la (sur)population carcérale (68 859 détenus pour 57 680 places). Cela n’est pas sans poser d’innombrables difficultés : dignité humaine, risques de suicide, impossibilité matérielle d’appliquer le Code de procédure pénale (encellulement individuel pour les détenus provisoires, séparation des condamnés et des non condamnés), surcoût budgétaire dans une période de restrictions.
Sur ce dernier point, certains, tels les Bataves, ont sensiblement réduit le nombre de détenus pour des raisons comptables, sans que la prophétie de Mme Taubira ne se réalise … la délinquance y est en effet demeurée à un niveau au moins équivalent. Mais il est vrai que comparaison n’est pas raison.
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