vendredi 26 février 2016

Periscopegate : même en prison, les réseaux sociaux sont à la mode

La Pénitentiaire, une Administration complètement à la ramasse qui a plusieurs guerres de retard...

Après Facebook, c’est sur Periscope que des vidéos de détenus jouant aux caïds ont fuité. Ces images nous rappellent que oui, la 4G entre dans les prisons. Lesquelles sont toujours débordées.
Centre pénitentiaire de Béziers (vue aérienne)

Luciano est un jeune comme les autres. Quand il est seul, il filme ses soirées en direct sur Periscope, et fait le zozo. Sauf que Luciano est en prison.

Comme Serge Aurier, il s’est fait avoir par cette application de vidéo live développée par Twitter.

Dans sa cellule de la maison d’arrêt de Béziers, il se pensait protégé : Periscope permet de diffuser publiquement (ou sur invitation) des « directs » éphémères, sans conserver d’archives à voir en différé. Comme le footballeur, il a été trahi par une capture vidéo diffusée sur YouTube.

Liens commerciaux :



On y voit Luciano rouler un joint devant la caméra de son smartphone. Il fait dans la triple provoc’ : téléphone portable, Internet et, évidemment, marijuana, sont interdits en prison. On l’entend commenter :

« C’est pas de la faute des surveillants, on a des colis. Pendant qu’on est en promenade, on se fait jeter des petites balles de tennis remplies de ce qu’on veut. La prison, c’est un petit Club Med. »
Selon Le Figaro, le détenu purge une peine de quatre ans de prison et a été entendu lundi après-midi au commissariat de Béziers. Le 24 février, sa provoc lui a valu d’écoper de six mois de prison supplémentaires (le procureur en avait requis dix) pour recel d’un objet irrégulièrement introduit dans un établissement pénitentiaire.

Les affaires comme celle-ci se suivent et se ressemblent. Aux Baumettes, l’an passé, c’est une page Facebook MDRoBaumettes où les détenus posaient avec des armes et de la drogue, qui a fait scandale. Une autre du même type est ensuite découverte à Nice, puis dans le Nord.

Et, comme à chaque fois que des images de prison s’échappent sur la Toile et dans les médias, la ritournelle du brouillage des ondes — pourtant coûteux et techniquement compliqué , voire potentiellement dangereux pour la santé — est de sortie.

Le garde des Sceaux fraîchement nommé Jean-Jacques Urvoas l’a entonnée ce mardi sur Europe 1. Il a aussi rappelé au passage que 30.000 téléphones avaient été récupérés dans les prisons en 2015. Face à la surpopulation carcérale et au manque de surveillants, il préconise de construire de nouvelles places dans les établissements pénitentiaires, comme Sarkozy avant lui, et à l’inverse de son prédécesseur Christiane Taubira.

Facebook, Snapchat et Periscope

Periscope semble à la mode en prison depuis environ un mois. Au moment où L’Obs déterre un direct de la maison d’arrêt d’Aix-Luynes, le 24 janvier dernier. Pendant plus d’une demi-heure, on y voit un prisonnier qui porte une cagoule fumer la chicha.

Une gloire éphémère qui a pu donner des idées à d’autres détenus ? Il suffit aujourd’hui d’une simple recherche par mot clés sur Twitter pour trouver traces de plusieurs Periscope de prison.

A Fleury-Merogis et aux Baumettes, par exemple, les premiers Periscope semblent dater de début février. A Fresnes, ils y arrivent quinze jours plus tard. Les prisonniers se filment dans leur cellule. Ils tchatchent avec leur public, parfois plus de 1 000 personnes, s’envoient des petits cœurs et des émoticones. Bref, ils s’ambiancent.

Sur YouTube, des chaînes sont régulièrement alimentées par des captures d’écran de vidéos de détenus, diffusées via Periscope ou Snapchat. Comme EnDirectdesBaumettes, créée il y a 6 mois. Et ça marche plutôt bien. La septième vidéo, diffusée en novembre, qui montre des prisonniers jouer à ventre-glisse dans les couloirs d’une prison non nommée, a été visionnée plus de 76 000 fois.

Secret de polichinelle

Le fait que les détenus aient accès à Internet via leur smartphone est donc un secret de polichinelle pour le grand public comme pour les surveillants. Si bien que le débat fait rage entre ceux qui veulent autoriser les portables et Internet en prison, comme dans certaines prisons suédoises ou allemandes, et ceux qui veulent au contraire durcir l’application de la loi.

Un prisonnier corse interrogé par Rue89 après l’affaire des Baumettes affirmait par exemple que dans sa prison, 70% à 80% des détenus avaient un téléphone portable.

Cette connexion leur permet de jouer aux caïds sur les réseaux sociaux, mais aussi de rester en contact avec le monde extérieur et de s’informer. Ce que cette partie visible de l’iceberg ne montre pas.

L'Obs

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...