Jean-Jacques Urvoas était auditionné mercredi par la commission des lois sur le futur texte anti-terroriste.
Il plaide et il plaidera. Jean-Jacques Urvoas qui, pour la première fois, était auditionné en tant que ministre de la justice par la Commission des lois a défendu, mercredi, le texte de loi devant renforcer le dispositif contre le crime organisé et le terrorisme.
Un seul message martelé tout au long de son discours, celui «d'une autorité judiciaire qui tient une place évidemment éminente» dans le dispositif. Pour le nouveau garde des Sceaux, il s'agit de convaincre les magistrats que le texte qui sera présenté, en séance, à partir du 1er mars, ne constitue pas un recul du juge judiciaire au profit de la police administrative, celui des libertés publiques, ou entraînant sans le dire l'extinction du juge d'instruction.
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Les pouvoirs d'investigation au cours de l'enquête - c'est à dire à l'initiative du parquet - ne seront étendus que «pour une durée très limitée et uniquement en matière de délinquance et de criminalité organisées», promet-il. Il a insisté sur les prérogatives d'enquête du juge d'instruction et du parquet qui «sont étoffées» dans les mêmes proportions, qu'il s'agisse «des perquisitions domiciliaires nocturnes ou de techniques de sonorisation, fixation d'images et captation de données».
«Une surveillance généralisée et indifférenciée»
Cela ne suffira sans doute pas à rassurer les avocats. Au barreau de Paris, une note adressée aux parlementaires met en garde «contre une surveillance généralisée et indifférenciée», puisque, notamment, les fameux Imsi Catcher permettant le recueil des données «couvrent les personnes se trouvant dans l'entière zone couverte et ce bien qu'elles soient totalement étrangères aux faits, objets de l'enquête ou de l'instruction». De même, les avocats s'inquiètent -ils de «l'absence de garantie des droits de la défense» en matière de perquisitions nocturnes ou lors de la retenue administrative de 4 heures prévue lors des contrôles d'identité par la police administrative. Le temps où les pouvoirs de l'avocat étaient élargi notamment lors de la garde à vue et lui donnant accès au dossier, semblent soudain bien lointain.
Pour rassurer, Jean-Jacques Urvoas rappelle, à l'envi, que ces prérogatives seront encadrées par le juge judiciaire et utilisées que dans le cadre de «la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée». Pour faire accepter ces dispositions aux tenants purs et durs des libertés publiques, le nouveau garde des Sceaux promet la nomination par décret du juge de la liberté et de la détention, pour un maximum de dix ans. Il appelle également de ses voeux l'avis conforme pour les nominations au parquet afin de garantir l'indépendance des procureurs. Une disposition législative actuellement entre les mains du Sénat.
L'opposition dénonce «une hypocrisie»
Mais la nomination de juges spécialisés dans les juridictions en manque de magistrats pour assurer la justice de tous les jours paraît quelque peu illusoire. Patrick Devedjian ne s'est pas gêné pour le rappeler: «Il est paradoxal qu'au moment où le gouvernement proclame l'indépendance de l'ordre judiciaire, on assiste à deux phénomènes préocupants: l'enlisement de la justice dans des contentieux de masse qui la prive de fait d'une autonomie réelle et un transfert de ses compétences vers le juge administratif». Et le député LR des Hauts de Seine de dénoncer «une hyprocrisie».
De son côté Eric Ciotti, député LR des Alpes Maritimes a déploré l'occasion manquée d'un texte qui renforce insuffisamment le dispositif contre le crime organisé et la lutte contre le terrorisme. «C'était l'occasion de montrer une rupture avec la politique de Madame Taubira», affirme-t-il, prévenant qu'il a bien l'intention de déposer des amendements pour «rétablir les peines plancher, revenir sur la contrainte pénale et instaurer le renseignement pénitentiaire».
En marge de l'audition, Guillaume Larrivé député LR de l'Yonne insistait, lui, sur l'absence d'un volet pénitentiaire conséquent. Alors que Jean-Jacques Urvoas dit ne pas être opposé à «un débat sur le durcissement des modalités des peines des condamnés pour terrorisme», le député LR a bien l'intention de plaider en séance en faveur «d'un quantum de peine de 15 ans pour faits de terrorisme, d'une perpétuité réelle dans ce type de cas, ainsi que pour la suspension des aménagements de peines des terroristes et la création d'un rétention de sûreté post peine pour ces derniers».
Le Figaro
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