mardi 9 août 2016

Visite de Manuel Valls : pourquoi les prisons sont surpeuplées

En visite à la prison de Nîmes lundi, Manuel Valls a annoncé un «nouveau plan concret» pour lutter contre la surpopulation carcérale. Il était accompagné de Jean-Jacques Urvoas, le ministre de la Justice, garde des Sceaux.


« Par le passé, il y a eu tant d’annonces sur le parc pénitentiaire… » a dit le Premier ministre, expliquant que son gouvernement allait prendre le problème de la surpopulation carcérale à bras-le-corps en annonçant un « nouveau plan concret » prévu pour l’automne.



Avec 69.375 détenus pour 58.311 places, les prisons françaises ont établi, en juillet, un nouveau record qui nécessite, aujourd’hui, bien plus que de simples annonces. Le journal gratuit 20 Minutes explique pourquoi la situation n’a pas évolué depuis l’arrivée de François Hollande à l’Elysée. Analyse en 5 questions et réponses :

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1/ Parce que ce n’était pas un engagement de campagne.

Quand François Hollande gravit, pour la première fois, les marches de l’Elysée en mai 2012, les prisons françaises disposent de 57.170 places pour abriter 67.073 détenus, soit un taux d’occupation de 117,3 %. Un peu plus de quatre ans après, le taux de surpopulation carcérale est encore plus élevé avec 58.311 places pour 69.375 prisonniers (118,9 %). Un record aux lourdes conséquences…

Mais difficile d’en vouloir au chef de l’Etat. En campagne, il n’a jamais promis de résoudre ce problème. Dans la fameuse liste des « Soixante engagements pour la France », il faut lire jusqu’au 53e consacré à l’indépendance de la justice pour y trouver une vague mention : « Les prisons seront conformes à nos principes de dignité ». Engagement non tenu bien sûr : la France a été condamnée des dizaines de fois pour « traitement dégradant » par la Cour européenne des droits de l’homme…

2/ Parce que le bilan de Christiane Taubira est mauvais​.

Pendant des mois, la droite l’a accusée de vouloir « vider les prisons ». A la tête du ministère de la Justice pendant quatre ans, Christiane Taubira n’a pas rempli son objectif en la matière. Présentée comme une alternative à l’enfermement, sa « contrainte pénale » est un échec.

« On nous demande de regarder les dossiers de chaque détenu quatre mois avant leur sortie afin de faciliter leur libération, lâche Céline Parisot, secrétaire générale de l’Union syndicale de magistrats (USM classée à droite). Mais une sortie, cela ne se prépare comme ça ! Et encore faudrait-il que les services d’insertion et de probation aient les moyens de le faire… »

Dans une interview à L’Express en juillet, Jean-Jacques Urvoas, l’actuel ministre de la Justice, a annoncé qu’il rendrait un rapport d’évaluation sur ce sujet en septembre. « Certes, le bilan quantitatif [de la contrainte pénale] apparaît extrêmement faible, mais je ne me limiterais pas aux chiffres… », promet-il.

3/ Parce que cela prend du temps et de l’argent de construire des prisons.

Entre l’annonce du projet et la pose de la première pierre, la construction d’une prison s’avère quasi aussi longue qu’un mandat présidentiel. Illustration avec les promesses de Christiane Taubira. Sur les 6.000 places annoncées lors de la réforme pénale, seules 2.500 ont vu le jour aujourd’hui. « Cela fait trente ans que j’entends les politiques de tous bords parler de construction de prisons. Et cela fait trente ans que les budgets ne suivent pas », lâche, amer, Philippe Campagne, surveillant et secrétaire national FO Pénitentiaire.

4/ C’est clair qu’on doit construire d’autres prisons.

Mais la tentation de promettre aux électeurs de nouvelles maisons d’arrêt semble trop forte pour les politiques. Alors que la campagne pour l’élection de 2017 n’est pas encore lancée, la droite a déjà annoncé qu’elle créerait 20.000 places d’ici à 2020 pour un budget de trois milliards d’euros. On se donne rendez-vous dans quatre ans pour faire les comptes ?

5/ Parce que la sécurité est un thème vendeur.

C’est l’histoire de l’œuf et de la poule. Les élus parlent-ils de sécurité parce que les électeurs s’y intéressent ? Ou les électeurs en font-ils une priorité parce que les politiques l’évoquent à chaque discours ? Impossible de le savoir. Toujours est-il que les politiques de plus en plus répressives ont de lourdes conséquences.

« Entre 1999 et 2014, le nombre de condamnations pour crimes et délits a augmenté de 38 %, assure Céline Parisot. Dans le même temps, le nombre de places de détention a crû, lui, de 18 %… » De quoi relativiser un peu plus le nouveau plan annoncé, ce lundi, par Manuel Valls depuis la prison de Nîmes.

« On considère que c’est une simple balade estivale, confie ainsi Philippe Campagne. Les annonces, c’est bien. Mais on n’y croit plus… »

InfosH24

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