Dans un entretien à Ouest-France, la ministre de la Justice, Christiane Taubira, revient sur les grands points de la réforme pénale. Pour l’expliquer, elle a entrepris un grand tour de France qui la mène, ce vendredi soir, à Rennes. Extraits.
Votre réforme de la politique pénale, prend-t-elle le contre-pied de la politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy ? Vous supprimez notamment les peines planchers.
Monsieur Sarkozy n’occupe pas mon esprit. Que laissera-t-il comme trace ? Et pensez-vous qu’après tant d’années de vie publique, je me ferais du tort en proposant aux Français un texte bancal et idéologique ? Non, je souhaite supprimer les peines planchers parce qu’elles sont automatiques et contraires à l’individualisation des peines, dont l’efficacité est reconnue. L’important est que mon projet de loi soit bon et bien écrit. Pour cela, j’ai beaucoup consulté, j’ai réuni une conférence de consensus, ce qui ne s’était jamais fait.
Qu’est-ce qui vous guide ?
Un constat. Notre code pénal est devenu brouillon, incohérent. 100 textes de lois l’ont modifié, ainsi que le code de procédure pénale. Une série de lois répressives a été votée : peines planchers, comparutions immédiates, récidive. Et en 2009 le seuil d’aménagement des peines a été porté jusqu’à deux ans de prison Ce qui est contradictoire. Résultat : le taux de condamnations en récidive légale a quasiment triplé depuis 2001. Le taux de sorties sèches - c’est-à-dire sans encadrement, autre facteur de récidive- est de 80 % et même de 98 % pour les courtes peines. Face à cela, je ne pouvais rester inerte.
Votre projet crée la contrainte pénale. Que recouvre-t-elle précisément ?
Nous n’inventons rien. Elle existe depuis plus de vingt ans dans des pays comme le Canada, la Suède ou le Royaume-Uni. C’est une peine restrictive de liberté en milieu ouvert. Elle est immédiatement exécutoire. Elle offre aux magistrats un choix supplémentaire entre l’amende, la mise à l’épreuve et la prison. Elle permet un suivi et un contrôle des condamnés. Elle évite la désocialisation que provoquent déjà quelques mois de détention. 10 à 14 % des détenus sortent sans hébergement, 30 % d’entre eux sans emploi. Sans parler des addictions qui n’ont pas été soignées.
Le précédent gouvernement voulait atteindre le chiffre de 80 000 places de prison en 2017. Et vous ?
80 000 places, mais pas un euro de prévu. À ce compte-là, je pourrais vous en annoncer 200 000 ! Nous allons créer 6 500 places supplémentaires d’ici la fin du quinquennat. Nous poursuivons le programme de rénovation. Fleury-Mérogis, les Baumettes, la Santé. Nous atteindrons les 63 500 places en 2017. Actuellement, il y a 67 000 personnes en détention pour 57 000 places
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