L’experte Henriette Haas défend une idée choc contre les risques de récidive des délinquants violents.
Henriette Haas, 55 ans, enseigne et pratique la psychologie légale entre Zurich et Montreux
L’horrible mort de sa collègue Adeline M. a bouleversé Henriette Haas, experte en psychologie légale réputée tant en Suisse alémanique que romande. Mais cette professionnelle expérimentée a surtout réfléchi à une solution «réaliste» pour lutter contre les risques de récidive chez les délinquants les plus dangereux. Ainsi est née son idée aussi simple que choc d’imposer l’implantation d’une puce électronique dans le corps des criminels dangereux dès leur première condamnation. Une manière drastique de leur mettre la pression et de les repérer en cas d’évasion ou de récidive après leur inévitable libération. Henriette Haas explique le sens de sa proposition, qui a déjà été reprise dans une motion déposée cette semaine aux Chambres fédérales par l’UDC genevoise Céline Amaudruz.
A peine votre idée lancée dans le débat, elle se retrouve à l’ordre du jour à Berne. Est-ce bien sérieux?
Tout d’abord, je précise que je ne suis pas inscrite à l’UDC mais au Parti libéral-radical! Plus sérieusement, je suis satisfaite que mon idée commence à être débattue, c’est le but. Mais j’espère toutefois que les extrêmes politiques ne vont pas juste bruyamment s’affronter. Le sujet est certes émotionnel, mais il faut oser en débattre sans tabou et rationnellement.
Comment vous est venue votre proposition d’implanter une puce aux criminels dangereux?
Le meurtre de ma collègue à Genève m’a profondément touchée et choquée. Et je me suis mise à réfléchir à un meilleur moyen de lutter contre les récidivistes qui commettent la majorité des crimes graves. Je suis partie d’un constat basé sur mon expérience professionnelle et de nombreuses études qui montrent que la certitude de se faire punir a plus d’effet que la longueur et la sévérité des peines. Les taux d’homicides sont par exemple plus élevés dans les pays connaissant la peine de mort.
Vous pensez donc vraiment que le fait de se balader avec une puce de surveillance dans le corps va empêcher un pervers de passer à l’acte?
Le fait de savoir qu’on va les repérer et les retrouver à coup sûr s’ils récidivent en s’évadant ou à leur sortie légale de prison peut vraiment avoir un effet préventif. Mais comme pour toute nouvelle mesure, il faudrait des tests scientifiques pour savoir si elle est efficace.
Mais, même sans tests, vous semblez y croire, non?
Pour avoir travaillé avec des délinquants dangereux, j’ai en tout cas pu constater qu’ils ne sont heureusement pas tous comme Fabrice A. Beaucoup sont motivés à changer. Et plus ils s’habituent à vivre sans retomber dans leurs démons, plus ils y prennent goût, car ils se sentent mieux. Même les plus grands pervers savent se montrer raisonnables lorsqu’ils sont sous surveillance. Il faut donc leur montrer qu’ils n’ont aucune chance d’échapper à une surveillance, même une fois sortis de prison.
Vous songez donc à implanter des puces à vie chez les délinquants dangereux?
Le débat qui s’ouvre doit justement répondre à ce type de question. Il faudra certainement envisager des critères de réévaluation de la mesure, notamment en rapport avec l’âge des condamnés ayant reçu une puce.
Au fait, pourquoi une puce implantée dans le corps plutôt qu’un bracelet électronique comme cela se pratique déjà dans les pays anglo-saxons?
Sachant que ma proposition est dure et répressive, il me semble qu’en contrepartie il faut éviter qu’elle stigmatise. Une puce a l’avantage de ne pas se voir et donc de ne pas handicaper la réinsertion souhaitée à la sortie de prison. Mais je ne sais pas si c’est techniquement réalisable ou si une autre idée meilleure et encore plus simple existe. Le but, encore une fois, c’est d’oser en discuter.
Et que dites-vous à ceux qui réclament que les récidivistes soient tout simplement internés à vie?
Sans être cynique envers les victimes, il faut constater que la prison à vie pour tous les délinquants dangereux récidivistes n’est pas réaliste. Avec le taux de récidive que connaît la Suisse dans ce domaine, il faudrait construire une prison par année pour les 200 à 300 cas qui surviendraient! Un tel régime serait ruineux pour la société. L’Etat de Californie, qui a tenté de l’appliquer, est au bord de la faillite.
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