Calmer le jeu par tous les moyens. Surtout lorsque l'on doit gérer, 24 heures sur 24, 1000 détenus dont la moyenne d'âge est comprise entre 25 et 35 ans et qu'il n'y a que 158 surveillants.
C'est le défi du personnel de la maison d'arrêt de Nanterre. «Quand les détenus sont inactifs, ils crient, frappent sur les portes, s'énervent. Heureusement qu'il y a le sport, c'est l'activité la plus importante pour eux. Risquer d'être déclassé, c'est ce qui peut leur arriver de pire», explique Leïla, jeune surveillante au tempérament bien trempé. Être déclassé, c'est ne plus avoir le droit d'aller à la salle de musculation ou sur le terrain de football. «Il est difficile de leur faire faire autre chose que ces deux sports. Même si j'ai quand même réussi à en convertir quelques-uns à la course», sourit le surveillant en charge du sport, en poste depuis l'été dernier.
Une liste d'attente bien remplie
Tous les jours, 60 détenus se partagent entre la minuscule salle de musculation et le terrain de sport en pleine rénovation. «Nous accueillons près de 400 détenus par semaine mais nous avons une liste d'attente de 200 personnes. On ne peut pas en accepter davantage à cause de l'organisation de leurs déplacements. Au-delà, cela devient dangereux.» «Tout le monde veut faire du sport, mais il y a un mois d'attente. Il y a beaucoup de gamins de 18-19 ans ici. Ils sont très énervés, ils ne dorment jamais la nuit», avoue un détenu, vêtu d'une tenue verte, l'uniforme de ceux qui peuvent travailler en détention. Le travail à l'extérieur des bâtiments n'est accordé qu'aux profils pénaux les moins dangereux, ayant écopé d'une courte peine. «Pour pouvoir travailler, il faut attendre quatre mois à partir du moment où l'on s'inscrit. C'est comme le sport, on veut tous travailler. Pour le terrain de foot, ils nous ont dit que nous allions travailler trois semaines.»
Les mécènes du CAC 40
Quatre détenus payés au smic sont en effet associés au projet de l'association de Pierre Botton, Ensemble contre la récidive. Ses mécènes, tous patrons du CAC 40, comme Axa, EDF, Vinci, Total, Lagardère ou Schneider Electric, lui ont déjà permis de lever une bonne partie de la somme nécessaire à la rénovation du terrain de foot, et à la création d'un couloir de course d'une centaine de mètres, soit 600 000 euros. Le conseil général des Hauts-de-Seine a donné 25 000 euros. «Il manque 300 000 euros pour une pelouse en synthétique», regrette Pierre Botton. «Nous finirons par y arriver, pour la pelouse, mais aussi pour le gymnase», appuie Jimmy Delliste, le directeur de Nanterre qui, tout-puissant sur son établissement, a décidé de mener le projet à son terme. «Développer les activités sportives, cela fait partie de la sécurité. Je serai favorable à chaque projet allant en ce sens.»
Les stars se mobilisent
Le regard du surveillant sportif erre à travers le terrain de foot. «Ici, les détenus ont un peu d'horizon, ce que vous n'avez pas dans une cour de promenade. Cela change tout, écoutez plutôt…». La clameur monte depuis l'autre côté des murs couronnés de trois rouleaux de concertina, ce barbelé militaire, la signature visuelle du monde carcéral. La maison d'arrêt de Nanterre, ce sont 24 000 mètres carrés à l'architecture compacte d'où sourd la tension latente propre aux prisons surpeuplées. Depuis dix jours, les travaux sont en cours: le terrain de football recouvert de schiste a été redessiné au plâtre blanc, et damé. Il est désormais entouré d'oliviers - l'ancien symbole de l'administration pénitentiaire -, de magnolias et de bancs. Un surveillant regarde, médusé, la perspective arborée: «Cela ne va pas être facile de surveiller tout ça. On ne voit plus ce qui se passe au fond du terrain.» C'est en effet par-dessus ces murs d'enceinte, jouxtés par une usine désaffectée, que sont jetés des colis de toute nature pour les détenus et qui sont le cauchemar de l'administration pénitentiaire.
Les stars mobilisées, Raymond Domenech, Yannick Noah et le judoka Djamel Bouras seront là.
Aujourd'hui est le grand jour: les stars mobilisées, Raymond Domenech, Yannick Noah et le judoka Djamel Bouras seront là pour symboliquement enlever les concertinas au-dessus d'un des grillages intérieurs. Pour Jimmy Delliste, le risque que les détenus en profitent pour aller récupérer les objets projetés est moins grave que la perte des ballons de foot qui crèvent régulièrement sur les barbelés: «Nous en avons pour 5 000 euros par an. Ceux qui ne respecteront pas le terrain n'y remettront plus les pieds, c'est tout», conclut-il calmement.
Nicolas Moreau, PDG d'AXA France: «Nous croyons à la réinsertion par le travail»
LE FIGARO. - Pourquoi Axa a-t-il décidé de soutenir Ensemble contre la récidive?
Le dirigeant a accordé 300.000 euros en trois ans à l'association.
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