jeudi 2 janvier 2014

La maison d'arrêt de Limoges, une voisine très gênante

Pour communiquer ou lancer des objets aux détenus de la prison, certains de leurs proches n’hésitent pas à déranger des riverains, excédés, jusque dans leur immeuble.

Viviane préfère désormais garder les volets de sa cuisine fermés. « Ils ne veulent pas que nous entravions leur moyen de communication, alors ils se vengent et jettent des pierres », expliquent les riverains. Photo Thomas Jouhannaud / Le Populaire du Centre - tous droits reserves
Viviane préfère désormais garder les volets de sa cuisine fermés. « Ils ne veulent pas que nous entravions leur moyen de communication, alors ils se vengent et jettent des pierres », expliquent les riverains.

Alcool, téléphones, substances illicites… Ce n'est plus un secret pour personne : chaque jour, depuis l'ancien parking du conseil général ou les immeubles alentour, des petits paquets sont illégalement jetés dans la cour de la prison par les proches de détenus. Et depuis deux ans, le phénomène se renforce. « Ça envoie de tous les côtés. Ceux qui font ça sont très mobiles : ils montent sur les toits, puis redescendent, agissent le jour, la nuit… Le problème est réel, dans tout le pays », explique le directeur de la maison d'arrêt, Yvon Liaigre. Ce jour-là, d'ailleurs, trois téléphones posés sur son bureau viennent d'être saisis en tant que « projections ».

Coups sur les capots des
voitures, carreaux cassés…
 
Et pour envoyer leurs paquets, certains proches n'hésitent pas à s'introduire, par effraction, dans les propriétés privées alentour. Bases de lancement idéalement situées. Même si cela implique de forcer des portes ou d'insulter les habitants, qui n'ont d'autre choix que de s'adapter. Installation d'interphone, pose de portail, investissement dans un digicode, appels au 17… « Mais ça ne plaît pas aux détenus. On entrave leur moyen de communiquer. Du coup, ils se vengent en jetant des pierres, des fruits ou des savonnettes vers le parking et les habitations ! Résultat : des coups sur les capots des voitures, des carreaux cassés… On sait qu'ils ne sont pas là pour cambrioler, mais ils dégradent les lieux et crient en pleine nuit ! » explique Robert (*), un riverain « excédé mais non résigné ».
Et ce n'est pas Viviane, qui habite un peu plus haut dans les étages, qui nuancera le propos. « Je les chasse la nuit, quand ils viennent crier depuis les fenêtres de mon étage pour communiquer avec les détenus. Et il faut voir ce que j'entends comme insultes ! Début décembre, un projectile lancé, je pense depuis la prison, a cassé la vitre extérieure du double vitrage de ma cuisine. Depuis, je garde certains de mes volets fermés. Je me plaisais ici, mais là, je n'ai qu'une hâte : partir ! »

Pour essayer de faire changer les choses, des habitants ont écrit à qui de droit. En vain. « Ces initiatives n'ont pas eu de réponse, si ce n'est l'entretien d'un doute sur l'exactitude des faits », lance Roger, en colère.
Le directeur de la prison, qui n'a pas d'autorité à l'extérieur de son établissement, multiplie les rapports. Mais « une prison en centre-ville engendre automatiquement des désagréments de ce type. Cette évolution reflète finalement celle de la société et du durcissement des comportements, notamment dans les cités. Nous enregistrons une augmentation des incidents à l'intérieur de nos murs aussi ! »

« Tout le monde
est au courant ! »
 
Pour un représentant syndical, il faut regarder du côté de la loi. « Tout le monde est au courant du problème ! En plus, dans le quartier, la prison est facilement approchable. On sait que les projections sont balancées depuis les immeubles alentour ! Seulement, on ne peut plus faire de fouille au corps des détenus ! Ils entrent donc plus facilement les objets ramassés dans les cellules. » Alors, que faire ? « Rehausser les murs ? C'est compliqué ( ils l'ont déjà été il y a quelques années, ndrl).

Construire une bulle autour du bâtiment ? Impossible. La police ne peut pas se permettre de faire des planques, faute d'effectifs. On ne peut finalement pas y faire grand-chose, on n'a pas les moyens pour ! »

De leur côté, Roger, Viviane et d'autres continuent de chercher des solutions. Mais croisent encore, malgré la sécurisation de leur immeuble, des intrus dans leur cage d'escaliers.
(*) Les prénoms ont été changés.

Source: Le Populaire

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